Déclaration de BIR-KAR
Des événements du 11 octobre à Berne : violence policière, terrorisme d’État et la force de la résistance légitime
Les crises profondes du système capitaliste-impérialiste font payer un lourd tribut aux travailleur.se.s, aux ouvrier.ère.s et aux peuples opprimés partout dans le monde. Pour surmonter la crise, ce système utilise la guerre, l’occupation et le génocide comme moyens, incitant au fascisme et à la barbarie. L’un des exemples les plus frappants de cette barbarie est le génocide perpétré par Israël contre le peuple palestinien depuis plus de deux ans. La Cour Internationale de Justice (CIJ) [1] et les commissions indépendantes de l’ONU [2] ont clairement qualifié ces actes de génocide et ont décidé de juger le Premier ministre israélien Netanyahu pour crimes de guerre [3].
L’État suisse est tenu de respecter la « Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide », qui stipule que les États membres de l’ONU s’engagent à « prévenir et punir » [4] le génocide, et de veiller à l’application de cette convention. Mais est-ce bien le cas ? Bien qu’elle ait prit un engagement clair en signant cette Convention, l’État suisse ne remplit pas cette responsabilité et adopte même une position qui consiste à dissimuler le crime. Complice du génocide systématique perpétré depuis des années contre le peuple palestinien, l’État suisse s’en prend également à ceux qui élèvent la voix contre ce massacre. Les actions de solidarité avec la Palestine menées dans de nombreuses villes du pays au cours des deux dernières années ont également mis en évidence la coopération économique, politique et logistique de l’État capitaliste suisse dans ce génocide. C’est précisément pour cette raison que la réponse de l’État s’est durcie, la répression de l’opposition légitime étant menée par la violence policière, la répression, l’interdiction et la criminalisation.
Après plusieurs manifestations réprimées à Lausanne, Genève, Bâle et Zurich, l’exemple le plus flagrant de cette attitude oppressive et tyrannique a été la manifestation organisée à Berne le 11 octobre 2025 et la répression policière qui s’en est suivie. À l’appel des mouvements progressistes, démocrates, antifascistes, révolutionnaires, « communistes », écologistes et pro-palestiniens, une manifestation nationale a été organisée dans le but de dénoncer la complicité de la Suisse. Selon la législation suisse, organiser des manifestations, des marches et des rassemblements sans autorisation est un droit constitutionnel en Suisse (Art. 16 & 22 Cst) [5], et les militant.e.s ont exercé ce droit. Cependant, lorsque l’appel a été diffusé sur les réseaux sociaux, l’État suisse, la municipalité de Berne et les forces de police se sont alarmés et ont lancé une vaste campagne de dénigrement. Les médias grand public ont affirmé que la manifestation était organisée par le Hamas et les communistes, et que des actes de violence étaient prévus, menaçant les participants de sanctions. La police a tenté de semer la peur en appelant la population à ne pas participer à la manifestation.
La ligne de lutte effective, légitime et militante a dénoncé la violence policière
Malgré toutes ces menaces et ces pressions, la marche, à laquelle ont participé plus de 15 milles personnes, a débuté à 15h30 en direction de la place fédérale. La police de Berne, avec le renfort de policiers venus d’autres cantons, a pris d’importantes mesures de sécurité en bouclant la place et ses environs. Lorsque le cortège s’est dirigé vers l’Amthausgasse, la police a érigé des barricades et est passée à l’attaque. Elle a utilisé des canons à eau, du gaz poivré, des gaz lacrymogènes et des balles en plastique contre les manifestant.e.s. Sur la place fédérale, la police a arrêté le cortège et lui a demandé de retourner à la gare. Lorsque les manifestant.e.s se sont dirigé.e.s vers une rue parallèle pour permettre de conduire le cortège vers la gare, la police a également recouru à la violence pour diviser le cortège. Un groupe de manifestant.e.s a été encerclé.
Cet encerclement a commencé le 11 octobre à 17 heures et s’est poursuivi jusqu’au 12 octobre à 5 heures du matin. Des centaines de personnes coincées à l’intersection de la Gurtengasse et de la Schauplatzgasse ont été retenues pendant des heures sans aucune information. Même leurs demandes d’accès aux toilettes ont été rejetées. Environ 550 personnes ont été arrêtées et 326 ont été blessées. Elles ont été emmenées par groupes de six au poste de police de la ville de Berne et les procédures d’arrestation se sont poursuivies jusqu’au matin. Cette situation montre que la violence policière n’est pas seulement disproportionnée, mais qu’elle vise directement la liberté de manifestation et d’expression et qu’elle a pour but d’intimider par des méthodes de punition collective. Cette violence est une attaque flagrante contre les droits démocratiques et le reflet de méthodes fascistes.
Après la manifestation, les médias et une foule de politiciens racistes de droite se sont mobilisés simultanément avec une agressivité sans précédente. Les manifestant.e.s ont été accusé.e.s de vandalisme, de terrorisme et d’appartenance à une organisation criminelle. Les déclarations du directeur de Fedpol ont directement associé le « Black Block » au terrorisme [6]. Les actions symboliques menées notamment contre la banque UBS ont été criminalisées à l’aide de mensonges faisant état de « millions de francs de dommages ». Une somme imaginaire, qui a été gonflé à bloc, afin que les accusations portées contre les militant.e.s soient plus choquante et facilement acceptées par la société. Or, les bâtiments visés étaient des institutions qui tiraient directement profit du génocide perpétré par Israël. De plus, la présence d’un groupe qualifié de « bloc noir » lors de la manifestation ne justifie en rien la violence policière ou les arrestations massives. Au-delà de l’action menée à Berne, la violence policière n’est pas un cas exceptionnel en Suisse, mais une pratique de plus en plus courante et systématique.
De même, les slogans inscrits sur le bâtiment de l’UBS ou les vitres brisées restent symboliques par rapport au profit fait sur le massacre du peuple palestinien, avec ce génocide. Ces actions sont le fruit d’une colère accumulée depuis des décennies d’occupation, d’exploitation et de génocide, et elles sont tout à fait légitimes. A toutes ces attaques, des mesures pour interdire les groupes antifascistes ou le droit de manifester sont mise en discussion. Ces discussions viennent après que la loi antifasciste adopté par un gouvernement fasciste comme Trump aux USA et celui d’Orban en Hongrie. C’est pourquoi les accusations odieuses diffusées par les médias n’ont servi qu’à discréditer la colère légitime du peuple et à marginaliser les mouvements antifascistes.
Ces tactiques de désinformation ne diffèrent pas des méthodes utilisées par le propagandiste nazi Goebbels. L’objectif est de légitimer la violence policière en manipulant les faits. En effet, les déclarations mensongères de la police sont publiées telles quelles par les médias, sans être remises en question, et l’antisémitisme et l’antisionisme sont délibérément confondus afin de discréditer les manifestant.e.s. Ainsi, la violence et les répressions policières sont légitimées dans les médias sous prétexte de « dommages matériels ».
Face à ces développements, l’attitude des sociaux-démocrates et des syndicats est édifiante. Non seulement ils n’ont pas soutenu l’action, mais ils sont également restés silencieux face à la violence policière. De plus, le licenciement des personnes ayant participé à la manifestation sous prétexte d’antisémitisme a même été discuté. Cette attitude est non seulement honteuse, mais elle constitue également une complicité qui ouvre la voie à de futures violations des droits.
Préparation progressive au passage à des régimes policiers
En Europe et en Suisse, considérées comme la vitrine du capitalisme et le berceau de la démocratie, la crise économique et sociale s’aggrave. Ces deux crises s’accompagnent d’une crise politique qui se traduit également par un recul politique. La « démocratie suisse », tant louée, cède peu à peu la place à la régression politique et à l’État policier, au racisme et à la xénophobie, au militarisme et à la guerre. Les droits et libertés démocratiques sont progressivement bafoués, les appareils de violence sont renforcés et les pratiques de l’État policier sont légitimées étape par étape.
En Suisse aussi, les pratiques répressives de l’État deviennent chaque jour plus systématiques et durables. La loi antiterroriste adoptée en 2021 a annoncé de nouvelles réglementations permettant désormais la surveillance des communications postales et téléphoniques. Cette réglementation, appelée OSCPT, devrait entrer en vigueur sans référendum ni vote populaire. Elle élargira les pouvoirs de surveillance générale de la police et supprimera de facto les libertés et droits fondamentaux. Ce type de lois s’inscrit dans un processus d’accaparement des acquis démocratiques.
Les événements du 11 octobre à Berne ne sont pas seulement un cas de violence policière, mais aussi un avertissement sérieux concernant le processus d’autoritarisation de la Suisse. Les campagnes de lynchage menées par l’État capitaliste, les médias et l’ensemble de la foule réactionnaire contre les manifestant.e.s constituent une préparation visant à réprimer et criminaliser les mouvements antifascistes et toute résistance future, et à restreindre progressivement les libertés démocratiques. Il est donc impératif de mettre en place une ligne de résistance plus déterminée, mieux organisée et plus répandue contre ces attaques réactionnaires. Dans cet ordre de plus en plus sombre, les rues continueront d’être le lieu de résistance le plus légitime.
Cette lutte ne consiste pas seulement à se tenir aux côtés du peuple palestinien, mais aussi à s’opposer aux politiques répressives qui s’enracinent de plus en plus en Suisse, à la montée du fascisme et à la violation des droits fondamentaux. Malgré ceux qui tentent de nous réduire au silence, nous devons parler plus fort, nous organiser plus efficacement et former une alliance plus déterminée. Car lutter contre l’oppression et la tyrannie n’est pas seulement un droit, c’est aussi une responsabilité historique.
Plateforme de l’Unité des Travailleur.se.s et de la Fraternité des Peuples (BIR-KAR Suisse)







