Le tribunal invoque le risque que Jérémy* parle avec d’éventuel.le.x.s suspect.e.x.s ou fasse disparaitre des preuves (risque de collusion). Les faits qui lui sont reprochés remontent à plus d’un an, il aurait donc largement eu le temps de faire tout cela.
Son enfermement poursuit d'autres buts : le faire craquer et le faire parler.
En plus, Jérémy* faisait l’objet d’un mandat d’arrêt depuis le 15 juin 2022. Les autorités ne semblaient pas pressées de l’arrêter, puisqu’elles ont laissé passer 9 mois avant d’utiliser ce mandat et de placer Jérémy* derrière les barreaux. Soudain on voudrait nous faire croire que son isolement est absolument nécessaire ? Il est évident que son enfermement dans une prison insalubre, surpeuplée et étouffante poursuit d’autres objectifs : les autorités cherchent à faire craquer Jérémy* en le privant de sa liberté, afin qu’il se déclare coupable, donne les noms de ses soi-disant « complices » et accepte de donner accès à ses téléphones et appareils électroniques. Cela est confirmé par les termes utilisés par le Tribunal. Selon leurs propres mots, s’il n’est pas libéré, Jérémy* « ne peut s’en prendre qu’à lui-même » [1]. Or le droit au silence est un droit fondamental et ne devrait en aucun cas être un motif de détention ! [2]
En enfermant Jérémy*, c'est tout un mouvement que la justice cherche à enfermer.
En enfermant Jérémy*, c’est tout un mouvement que la justice cherche à enfermer. L’acte dont Jérémy* est accusé s’inscrit dans un enchaînement de mobilisations pour le climat d’une ampleur inédite. Dès 2018, c’est toute une génération qui descend dans la rue aux quatre coins du monde pour manifester et exiger des réactions étatiques appropriées face à l’urgence climatique. Des voix de plus en plus nombreuses dénoncent la dangerosité d’entreprises multinationales qui attaquent le vivant et participent activement à la destruction de notre planète. Parmi les responsables de la situation climatique catastrophique, le géant du béton Holcim sort du lot, de par sa taille et ses actes destructeurs. Cela fait des années que le mouvement écologiste appelle à stopper cette multinationale, parmi les plus polluantes du monde et accusée de crime contre l’humanité [3].
Après l’espoir et la force de ces premières mobilisations, vient la désillusion suscitée par l’inaction des gouvernements et des institutions. Alors que la génération climat a tout essayé : les pétitions, les marches pacifiques, les blocages, les actions de désobéissance civile… nous ne pouvons constater aucun changement efficace. Malgré des déclarations paternalistes félicitant ces jeunes pour leur engagement citoyen, les autorités se sont bien gardées de mettre en place les mesures concrètes appelées par le mouvement. C’est bien de faire des grèves de l’école, mais il ne faudrait quand même pas que ça nuise à l’économie. Les pétitions d’accord, mais évitons surtout de nous attaquer aux multinationales !
Face à l’inaction et la répression, il semble logique que le mouvement climat diversifie ses modes d’action et ait recours au sabotage.
Les autorités ne se sont pas contentées d’ignorer les revendications du mouvement climat. Dès que les mobilisations ont pris de l’ampleur, une répression féroce s’est abattue sur les militant.e.x.s. A Genève, nous pouvons penser au procès des « mains rouges », où des militant.e.x.s étaient accusé.e.x.s de dommage à la propriété pour avoir mis de la peinture sur le siège de Crédit Suisse en 2018. En 2019 également, les militant.e.x.s de la Treille qui s’étaient assis.e.x.s sur une rue piétonne ont reçu des amendes pour refus d’obtempérer. A Zürich, c’est 200 personnes (200 !) qui se retrouvent sur le banc des accusés dès 2021 pour s’être assises sur un pont en 2019.
La cible d’Holcim apparait plus fortement encore dans le paysage en 2021 avec l’occupation de la colline du Mormont dans le canton de Vaud. Des militant.e.x.s s’installent pour défendre le vivant face à l’extension d‘une carrière d’Holcim. A nouveau, la ZAD est violemment évacuée et les zadistes se retrouvent confronté.e.x.s à une machine infernale de répression juridique.
Il semble logique et légitime que face à l’inaction et face à la répression, le mouvement pour le climat diversifie ses modes d’action et ait recours au sabotage. Que ce soit Jérémy* ou non qui ait commis les actes dont il est accusé, peu importe, la question est de savoir qu‘ ils s’inscrivent dans la droite ligne des mouvements pour le climat. Il ne s’agit pas d’actes de vandalisme isolés, il s’agit de modes d’action qui fleurissent dans le paysage politique au vu de la situation d’urgence.
La détention de Jérémy* est donc politique. Elle individualise notre camarade et le coupe du mouvement dans lequel il s’inscrit : un mouvement large, hétéroclite de défense du vivant. Le ministère public évoque un risque de collusion, mais collusion avec qui ? Avec l’ensemble du mouvement, l’ensemble des individus qui se battent pour un monde meilleur ! Jérémy* est un prisonnier du mouvement pour le climat et nous ne pouvons que le défendre !