Placer Jérémy* en détention préventive est arbitraire et disproportionné.
Une détention préventive doit se justifier soit par un risque de fuite de la personne détenue, soit par un risque de collusion [1] entre elle et d’éventuel.le.x.s complices ou victimes, soit par le risque de réitération de l’infraction reprochée. L’existence d’un seul de ces risques peut suffire à fonder une détention provisoire. A part la prison, d’autres mesures et dispositifs existent comme l’assignation à domicile par exemple, qui permettent concrètement de pallier ces “risques”. Il faut donc faire le triste constat que la justice fait le choix d’imposer à notre ami un traitement disproportionné et punitif, avant même la fin de l’enquête censée prouver sa culpabilité.
Il est très clair pour nous que Jérémy* se retrouve aujourd’hui à Champ-Dollon pour des raisons politiques. Le risque de collusion retenu n’est pas suffisant pour justifier de le placer en détention. Nous voyons bien que Jérémy* se retrouve en prison car c’est un militant. Le but non-avoué de sa mise en détention est de faire peur, autant à lui qu’à toute.x.s celleux qui luttent pour un monde meilleur.
De plus, le dossier d’enquête comporte de nombreux points d’obscurité qui révèlent des pratiques abusives et illégales de la part de la police.
Plusieurs agissements douteux de la part des forces de l’ordre sont à relever. La police avait convoqué Jérémy* pour une audition en mars 2022, pour une affaire de tag anti-fasciste. Ils avaient alors prélevé son ADN. Or, absolument rien ne justifiait une prise d’ADN, à ce moment-là. Le numéro de téléphone de Jérémy* était également connu de la police alors que ce dernier ne le leur avait jamais transmis. Ces deux éléments laissent penser que, à 22 ans à peine, Jérémy* était déjà dans le viseur de la police depuis un certain temps. Il était certainement fiché à cause de sa participation à des mobilisations politiques. La police, avec la complicité des autorités pénales, a utilisé des pratiques illégales pour former une accusation et le mettre en détention.
Les conditions de détention à Champ-Dollon sont inhumaines et dégradantes.
Jérémy* se trouve actuellement à la prison de Champ-Dollon, une prison destinée à la détention préventive (=avant un jugement) et aux courtes peines. Champ-Dollon, cette prison dont les conditions de détention sont parmi les pires d’Europe. Les personnes détenues passent 23 heures sur 24 en cellule. Elles n’ont droit qu’à une heure de promenade par jour et passent le reste de leurs journées dans des cellules souvent partagées avec plus de détenu.e.x.s qu’il n’y a de places prévues. Champ-Dollon est réputée pour ses conditions de détentions inhumaines et sa surpopulation. En effet, pour 398 places officielles [2], Champ-Dollon enferme entre 600 et 800 détenu.e.x.s. La prison ne compte que trois téléphones, autant dire des mois d’attente pour pouvoir téléphoner à ses proches. Les détenu.e.x.s n’ont droit qu’à deux fois une heure de sport par semaine et la session de sport peut être annulée sans aucune forme de remplacement. Il y aurait encore beaucoup à dire : l’humiliation de la fouille à nu avant et après chaque visite, les violences des gardien.ne.x.s, la difficulté d’accès aux médecins [3], l’accès aux produits essentiels possible seulement durant “l’heure de réclamation” (passage des gardiens) à 7h du matin, la chaleur de la canicule et le manque de mesures l’été passé [4], la gestion désastreuse de la pandémie en 2020 et 2021, les parloirs surveillés, les conversations téléphoniques avec les proches enregistrées, le courrier systématiquement lu et censuré et on en passe. Même le Tribunal fédéral a qualifié les conditions de détention à Champ-Dollon d’inhumaines et dégradantes en 2016 [5].
Ni Jérémy*, ni personne d’autre ne devrait vivre dans ces conditions.
Qui est-ce qu’on enferme à Champ-Dollon ?
En prison, jamais ne se retrouvent les cadres d’Holcim et des autres multinationales mortifères, pourtant responsables d’innombrables crimes. [6]. En prison se retrouvent principalement les personnes qui n’ont pas les bons papiers, les personnes racisées ou pauvres. La prison a comme véritable fonction d’exclure les indésirables, pas de réduire la criminalité [7]. Jérémy* a le privilège d’avoir des papiers suisses et d’être blanc. Il n’aura pas à subir les insultes racistes [8] des gardiens, ni à craindre un renvoi à sa sortie. Il a de nombreux proches pour lui apporter des colis et lui écrire, contrairement à beaucoup de personnes incarcérées. Mais Jérémy* fait aussi partie des indésirables du “bon ordre de la société”, il est fiché comme militant, il remet en question les injustices de la société actuelle.
Solidarité avec Jérémy* !
Des recours juridiques sont en cours mais nous considérons qu’il est nécéssaire qu’une mobilisation large se forme. Nous refusons le fichage des activistes, nous refusons que la police puisse faire usage à tout va de techniques illégales et nous refusons surtout l’enfermement de nos camarades.
Nous appelons tou.te.x.s nos camarades à témoigner leur solidarité à Jérémy*. Pour qu’il sorte de prison au plus vite, pour lui montrer qu’il n’est pas seul et pour dénoncer les conditions de détention de la prison de Champ-Dollon.
Solidarité avec Jérémy* et avec toutes les personnes enfermées !
* Prénom d’emprunt