Migrations - Frontières Expulsion Détention administrative Migration Antifascisme

Revue de presse antiraciste du 3 août

Antira.org est une revue de presse hebdomadaire suisse-alémanique dont l’objectif est de constituer une ressource pour les luttes antiracistes grâce à une analyse de l’actualité et des transformations du racisme systémique.

Quoi de neuf ?

Italie : L’armée isole un hotspot italien, la ministre de l’intérieur œuvre pour la fermeture des voies de migration avec un nouveau financement pour la Tunisie

Les départs de Tunisie et de Libye ont encore augmenté ces dernières semaines. Le camp d’accueil de Lampedusa est dix fois trop surchargé. Le maire local condamne la gestion de la situation par le gouvernement : l’état d’urgence avait été déclaré en 2011 alors que le camp était déjà surchargé mais loin d’être aussi bondé qu’aujourd’hui. Les responsables du gouvernement italien ont immédiatement réagi :
“C’est effectivement un moment difficile. Ces nouvelles arrivées constantes sont inacceptables, nous faisons tout ce qui est possible”.
Ce ne sont pas les nouveaux arrivant·e·s qui sont inacceptables, mais la politique européenne de migration doit être mentionnée. Le ministre des affaires étrangères Luigi Di Maio a alors attaqué l’UE :
“J’exige une réponse de l’UE : dans une telle situation, où il existe un risque sanitaire élevé, nous attendons une répartition immédiate des migrant·e·s dans tous les pays européens. La cohésion sociale italienne est en jeu”.
Une fois de plus, la droite profite de la situation pour lancer une campagne contre les exilé·e·s.
Par rapport à 2011, ce n’est pas seulement la surpopulation du centre d’accueil qui est problématique. Les mesures liées au Coronavirus et la quarantaine engendrent des conditions proches de celles d’une prison. Pour échapper à cela, plusieurs centaines de personnes ont fui les camps de Sicile. Le gouvernement de Rome a alors envoyé 300 soldats pour “reprendre le contrôle” de la situation. A l’avenir, les camps devraient être tenus sous surveillance militaire.

La ministre de l’intérieur italienne Luciana Lamorgese s’est rendue en Tunisie la semaine dernière et a demandé au gouvernement du pays de mieux contrôler ses côtes et de fermer à nouveau les voies de passage. En effet, depuis la Tunisie, les migrant·e·s partent en bateau vers Lampedusa et la Sicile. L’Italie se tient “prête à soutenir la Tunisie dans ce domaine”, a déclaré le ministre de l’intérieur au président tunisien Kaies Saied.
Elle a également promis à la Libye de l’aider à fermer les voies de passage. À la mi-juillet, Madame Lamorgese était à Tripoli et avait assuré au président libyen Al-Serraj que les accords sur la prévention des migrations entre l’UE et la Turquie pouvaient également s’appliquer à la Méditerranée centrale.
On oublie qu’il ne s’agit pas d’une “nouvelle urgence”. L’état de surpopulation des structures d’accueil perdure depuis des années et ne résulte pas d’une augmentation des arrivées en provenance de Tunisie et de Libye, mais d’une décision politique : le sous-financement des structures et leur mauvais équipement, ainsi que la configuration générale du régime migratoire européen. Alors au lieu de transférer du jour au lendemain à l’État tunisien 30 millions d’euros pour mettre un terme aux départs de migrant·e·s, comme l’a fait Mme Lamorgese lors de cette réunion à Tunis lundi dernier, la politique européenne de migration en entier devrait être reconsidérée. Cependant, il est peu probable que ce gouvernement le fasse.

Après les avoir refoulés, les autorités libyennes abattent trois personnes du Soudan

Avant d’abbatre de les abbatre, les soi-disant gardes-côtes lybiens leurs ont empêché avec violence la traversée de la Méditerranée. Avec environ 70 autres migrant·e·s, ces derniers ont été débarqués de force dans le port de al-Khums, duquel plusieurs personnes ont essayé de fuir. Sans pitié et sous les yeux de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), les autorités libyennes ont alors ouvert le feu et abattu trois personnes.
L’OIM, qui fournit dans ce port des secours d’urgence aux refoulé·e·s, a twitté après l’assassinat des trois hommes ce que tout le monde savait déjà : « Nous maintenons que la Libye n’est pas un port sûr ». Il est évident que l’UE s’en moque de ces meurtres, voire que ceux-ci l’arrangent. En effet, de plus en plus de rapports montrent comment Frontex et d’autres organismes européens travaillent main dans la main avec les gardes-côtes meurtriers et les autorités libyennes sur terre pour effectuer des refoulements coordonnés. De plus, il importe peu aux dirigeant·e·s européen·ne·s que les survivant·e·s de la fusillade ne vivent désormais pas en liberté, mais en internement dans l’un des camps de prisonnier·es libyen·nes maintes fois critiqués.

de plus en plus de rapports montrent comment Frontex (...) travaillent main dans la main avec les gardes-côtes meurtriers et les autorités libyennes...

Alors qu’aucun navire civil de sauvetage en mer ne navigue actuellement en Méditerranée, le US-Africom, un navire appartenant au Commandement états-unien pour l’Afrique, a fait son apparition cette semaine. Le gouvernement américain signale à travers cela qu’il veut surveiller la Méditerranée et qu’il pourrait intervenir. Ce message s’adresse notamment aux troupes turques qui coopèrent avec le soi-disant gouvernement d’unité libyenne (GNA) et lui fournissent des armes – alliance que jusqu’à présent, le gouvernement américain semblait approuver.

Nouveau cours sur le racisme dans la pratique médicale

Un nouveau cours sur le racisme dans la pratique médicale sera proposé en automne à la Faculté de biologie et de médecine de l’Université de Lausanne. Dans une interview accordée au journal Le Temps, Patrick Bodenmann, professeur de médecine et chef du département vulnérabilités et médecine sociale d’Unisanté, explique pourquoi cet enseignement est aujourd’hui indispensable pour les futurs médecins : selon lui, les préjugés tels que la croyance selon laquelle les Noirs prennent mauvais soin de leur santé, que les médecins non blanc·hes sont moins qualifié·es que les médecins blanc·hes ou que les personnes originaires de la région méditerranéenne exagèrent systématiquement les sensations douloureuses, font partie de la vie professionnelle quotidienne.

Outre ces stéréotypes, les discriminations et les préjugés qui existent dans la société blanche au sens large sont également présents dans ce corps de métier ; on se souvient notamment des étudiant·e·s de l’Université de Lausanne, qui, pour le dernier jour de leurs études répondaient au thème “Que serions-nous si nous n’avions pas étudié la médecine ?” en venant déguisé·e·s en tant qu’“Africain·e·s”.

L’objectif du cours serait d’encourager les étudiant·e·s à confronter leurs racismes intériorisés et à acquérir des compétences interpersonnelles, communicatives, socio-analytiques et transculturelles afin de pouvoir traiter les différents profils de patient·e·s avec la même attention.

Patrick Bodenmann soutient également que l’intérêt pour le racisme devrait prendre une place plus importante dans la recherche.

« L’absence de collecte de données sur l’origine raciale ou ethnique des patient·es dans les protocoles de recherche ne permet pas d’avoir une information précise sur l’amplitude du racisme et de ses conséquences sur la santé et sur l’accès aux soins. Ce blind spot, ou cette color blindness, est contre-productif, voire néfaste, car il empêche la mise en évidence d’une forme de racisme très probablement présent. De plus, l’absence de données complique la mise en place de mesures ou de réformes pour lutter contre les discriminations raciales. ».

Que se passe-t-il au niveau de l’État ?

Toujours pas d’accord d’expulsion avec le régime érythréen en vue

Les autorités suisses font de grands efforts pour conclure un accord de réadmission avec le régime en Erythrée qui permettrait des renvois forcés systématiques dans ce pays. Les efforts semblent se poursuivre en vain. Deux réunions ont déjà échoué ces dernières années. Cette année, une autre a été annulée à cause du Coronavirus.
Le régime érythréen semble ne pas être suffisamment intéressé par un tel accord. En effet, la diaspora met plus d’argent dans les caisses de l’État que les fonds de développement supplémentaires que le régime se verrait promettre en cas d’accord d’expulsion. Cette année, la Direction suisse du développement et de la coopération (DDC) a versé six millions de francs pour des « projets de coopération en Érythrée ». Ce montant est apparemment trop faible pour le régime, car même un paquet « développement » de 200 millions d’euros de l’UE n’a pas réussi à convaincre le régime de négocier un accord de réadmission.

Qu’est-ce qui a été remarqué ?

Ce que l’Union Européenne a à voir avec la violence sur les itinéraires terrestres africains

C’est souvent bien plus tôt qu’en Méditerranée ou aux frontières extérieures de l’Europe que les personnes en exil font leurs premières expériences de la brutale violence des régimes migratoires. Par exemple, sur les routes terrestres du continent africain vers la Libye qui, ces dernières années, sont devenus extrêmement dangereux et parfois mortels. Et ce, en partie du fait que l’UE déplace continuellement ses frontières extérieures plus loin et contrôle désormais de nombreux passages frontaliers en Afrique du Nord. Par conséquent, il n’y a pratiquement pas de voie (légale) pour les personnes en fuite sur ces routes terrestres. C’est pourquoi beaucoup n’ont pas d’autre choix que d’emprunter des itinéraires très dangereux ou de payer beaucoup d’argent.
Une étude récemment publiée fait état de cette violence à l’encontre des migrants sur les routes terrestres à travers le continent africain :

  • Pour cette étude, le Mixed Migration Center a interviewé des hommes et femmes migrantes entre 2018 et 2019 sur les routes de migration entre le Soudan oriental, le désert du Sahara et la Libye. Des personnes rapportent des meurtres, des violences sexuelles et sexistes, des violences physiques et des enlèvements. Selon l’étude, les migrant·e·s subissent les violences les plus brutales telles que des brûlures à l’huile chaude ou aux objets métalliques chauds, les chocs électriques, l’immobilisation dans des positions de stress et des violences sexuelles.
  • En 2018 et 2019, au moins 1 750 personnes sont mortes sur ces routes. En outre, il y a ceux qui meurent sur le chemin qui traverse la Méditerranée pour rejoindre l’Europe : Sur la route de la Méditerranée centrale, principalement en provenance de Libye, plus de 2 500 personnes sont mortes ces deux dernières années. Il y a également un nombre élevé de cas non signalés, car de nombreuses personnes meurent sans être remarquées dans les déserts.
  • Dans les zones de passage du désert et aux postes frontières, les violences sexuelles contre les filles et les femmes, mais aussi contre les garçons et les hommes, sont très fréquentes. Environ 31 % des personnes interrogées qui ont subi des violences sexuelles en 2018 ou 2019 ont été exposées à ces violences dans plus d’un endroit. En Afrique du Nord et de l’Est, les trafiquants d’êtres humains ont été les principaux responsables, représentant 60 à 90 % des attaques signalées sur les différents itinéraires. En Afrique de l’Ouest, les forces de sécurité, les militaires et les policiers sont les principaux responsables de ces actes.
  • Selon l’étude, les employés du gouvernement tels que les gardes-frontières, la police ou l’armée sont les principaux responsables de la violence. Il n’est pas rare que ce soient des agents payés par l’UE pour le contrôle de la migration.
  • Les personnes qui survivent souffrent souvent de traumatismes. Pour beaucoup, leur arrivée en Libye est la dernière étape d’un voyage marqué par des mauvais traitements tels que la torture, le travail forcé et les coups - ainsi que par des meurtres arbitraires. Avec les personnes arrêtées par les garde-côtes libyens en Méditerranée - déjà plus de 6 200 cette année - elles sont généralement enfermé·es dans des camps libyens dans des conditions de vie inhumaines. Certains d’entre elles parviennent à s’échapper de ces camps. Mais selon toute probabilité, elles seront à nouveau interceptées en Méditerranée par les garde-côtes libyens ou européens et ramenées en Libye. Certaines arrivent dans un port européen. C’est alors que commence pour elles le calvaire des régimes d’asile européens.

Tout cela est connu depuis des années. Il n’y a pas d’histoires inventées ou de petites irrégularités dans le système. C’est la réalité quotidienne de milliers de personnes. Elle n’est pas le fruit du hasard. Elle a été délibérément créée par un système de contrôle des migrations imperméable et brutal, largement financé par l’UE à travers des « partenariats migratoires », des accords de réadmission, un soutien financier, logistique, humain et matériel.

Nouvelle évacuation d’un camp à Paris

A Aubervilliers, les policier·e·s ont de nouveau évacué un camp : selon la préfecture, 2 114 personnes vivaient sur les rives du canal Saint-Denis. Les forces de l’ordre ont fait sortir les gens de leurs tentes et les ont emmenés dans des gymnases de la région, servant provisoirement d’hébergement d’urgence. Les associations locales ont déclaré au journal local Le Parisien que le plus gros problème était que les gens ne savaient pas où ils allaient ni dans quel type d’hébergement ils étaient emmenés. De plus, après cet hébergement court et temporaire, la plupart d’entre eux se retrouveraient à nouveau dans la rue.
Il est également troublant d’apprendre que, suite à l’évacuation, les associations présentes démantèlent autant de tentes que possible avant que la police les détruise ; les bénévoles les chargent ensuite dans des fourgons organisés à cet effet. Cela est fait avec le plus grand pragmatisme et en préparation du prochain camp, qui, lui, verra certainement le jour dans les semaines qui suivent.

Les autorités grecques empêchent Médecins sans frontières de travailler à Moria

Au Camp Moria de Lesbos, plus de 17 000 personnes sont toujours emprisonnées.

Le couvre-feu a été prolongé une sixième fois, initialement jusqu’au 2 août. En raison des conditions de vie catastrophiques dans un espace aussi restreint, des conflits et des tensions ne cessent de surgir. La semaine dernière, un homme de 21 ans a été poignardé à mort. En 2020, sept personnes sont déjà mortes à Moria suite à des attaques à l’arme blanche, dont un mineur. Douze autres ont été blessées. Les autorités locales ne cherchent pas à changer la situation ; au contraire, elles compliquent encore le travail de, par exemple, Médecins Sans Frontières (MSF), dont le poste Covid 19 au camp de Moria est en train d’être fermé. Sous peine d’amendes et de poursuites judiciaires, MSF a été contraint de renoncer à la seule possibilité d’isoler les personnes dont le test était positif. La raison invoquée par les autorités est que certaines normes en matière d’aménagement du territoire n’ont pas été respectées. C’est encore un exemple de la façon dont une bureaucratie défaillante est utilisée à mauvais escient pour pourrir la vie des gens.

Et maintenant ?

Appel à dons pour les antifascistes condamnés à Florence

Il y a sept ans, en novembre 2013, deux jeunes sont passés devant un bar du centre de Florence. Les partisan·e·s du groupe néo-fasciste Casapound s’y étaient réuni·e·s. Les deux garçons ont été relevés comme antifascistes et par la suite attaqués par les fascistes. La police a assisté au passage à tabac des deux hommes. La semaine suivante, près de mille antifascistes sont descendu·e·s dans la rue, afin de ne pas rester passifs et passives face à cette agression. Une manifestation pleine de colère et de détermination.
En juin de cette année, 15 personnes ont été jugées « coupables » par la Cour suprême et condamnées à des amendes et à des peines de prison. Des dons sont maintenant collectés pour elles : « Avec cette collecte de fonds, nous demandons une contribution car - comme l’histoire nous l’apprend - la lutte contre le fascisme ne peut être laissée aux institutions et à la police. », écrivent les personnes qui ont lancé le financement du crowdfunding.

We’ll Come United appelle aux Journées contre le racisme 2 au 5 septembre 2020

Après l’assassinat de George Floyd par un policier à Minneapolis, le mouvement Black Lives Matter est descendu dans la rue et a montré à tous que le racisme est un système mondial - et que les luttes antiracistes sont au cœur du changement social. Au cours d’une impressionnante vague de manifestations mondiales, il est apparu clairement qu’il existe d’innombrables liens entre nos luttes. Nous pensons que nous avons besoin de nouvelles et grandes coalitions pour la justice, pour les droits sociaux et politiques et pour un autre vivre ensemble - au-delà des différents mouvements et à l’échelle transnationale,

déclare l’appel de “We’ll come united.”

Partout en Europe, des journées d’action auront lieu du 2 au 5 septembre sur les thèmes de la Marche de l’espoir, #LeaveNoOneBehind, de la mer aux villes, des attaques et meurtres terroristes racistes, de la migrantifa et de la lutte contre les déportations. En Suisse, nous voulons profiter de ces journées pour créer des réseaux, mener des actions communes et organiser une manifestation de solidarité le 05.09.20 à Zurich. Nous sommes toujours à la recherche de personnes et de groupes intéressés pour organiser et soutenir la manifestation. Veuillez nous écrire si vous souhaitez co-organiser et/ou agir en tant que supporters

schweiz@seebruecke.org.
https://seebruecke.ch/aktionstage

Résistance !

Protestations dans les prisons d’expulsion slovènes

Les personnes détenues dans les prisons d’expulsion en Slovénie ont commencé à protester la semaine dernière.
Leurs revendications sont dirigées contre un projet qui leur a été annoncé par les autorités slovènes et qui consiste à les refouler vers la Croatie. Ces dernières semaines, il y a eu plusieurs cas de personnes expulsées depuis les camps de réfugié·e·s slovènes vers la Croatie, d’où elles ont été ensuite expulsées vers la Bosnie. Tout cela sans aucune chance d’obtenir une procédure d’asile dans l’un de ces pays. Ces procédures, régulièrement effectuées par les États européens, sont illégales au regard du droit européen. Néanmoins, elles sont quotidiennes.
La pratique des refoulements est extrêmement inquiétante pour les personnes concernées, car elle rend le régime d’asile européen encore plus arbitraire. De plus, elle prive les personnes de la certitude de pouvoir compter sur au moins certains droits fondamentaux.

La pratique actuelle montre également qu’il importe peu que cette pratique soit légale ou illégale. Il est évident que les dirigeant·e·s et les autorités s’en moquent tout simplement. Au cours de cette nouvelle vague de refoulements, le tribunal administratif de Ljubljana a en effet constaté, dans un important jugement, qu’un refoulement effectué l’année dernière de la Slovénie vers la Bosnie via la Croatie violait les droits fondamentaux. Néanmoins, les autorités poursuivent leur pratique comme si de rien n’était. Il est problématique que ces décisions de justice présentent les incidents comme des problèmes individuels, alors qu’il s’agit de problèmes structurels. A côté de ce refoulement qui a été jugé comme illégal, il a en effet eu des milliers d’autres qui ne seront jamais poursuivis en justice.

Manifestations antinationales le 1er août

Le 1er août, les gens sont descendus dans la rue à Berne, Bâle et Lucerne pour manifester contre le mythe selon lequel la Suisse est un pays à célébrer. À Berne, environ 300 personnes sont descendues dans les rues du centre ville l’après-midi. L’un des objectifs était de créer un espace pour traiter de la responsabilité de la Suisse officielle en ce qui concerne l’esclavage, l’antisémitisme, l’antiziganisme et la chasse aux sorcières.
À Bâle, une marche de solidarité a conduit à la prison d’expulsion Bässlergut. Les prisonniers étaient accueillis avec des slogans. Ils ont renvoyé les salutations des fenêtres. Sur le communiqué de l’action on pouvait lire :

“Nous trouvons absolument dégoûtant et ironique que des gens célèbrent la si grande nation qu’est la Suisse ce soir-là, alors que cet État-nation, défini par des frontières, assassine par une politique rigide d’isolement et de migration”

À Lucerne, des militant·e·s ont installé plusieurs banderoles dans la nuit du 1er août et ont coloré en noir le cœur du château Gütsch, car ce mirador, qui était jusqu’à récemment accessible à tous, ne peut plus être visité que contre paiement.

La lutte pour la justice de Mike Ben Peter se poursuit

Mike Ben Peter est mort il y a deux ans et demi, le lendemain du jour où la police l’a maintenu face contre terre, les mains derrière le dos et les jambes croisées vers le haut jusqu’à ce qu’il perde connaissance et doive être hospitalisé. Depuis lors, les collectifs Kiboko, Jean DuToit, St.Martin, Le Sleep-in, Outrage, A qui le tour ?, Afro-Suisse, Droit de rester, Alliance contre le profilage racial, ainsi que le POP-Vaud, Solidarités-Vaud, Grpve du Climar Vaud ou La Grève Féministe Vaud se battent en Suisse romande pour que ce meurtre ne soit pas éclipsé par la justice.

Il y a quelques jours, ils se sont à nouveau mobilisés. Ce jour-là, des expert·e·s médicaux et médicales ont dû être interrogé·e·s - parmi les personnes plus importantes pour le procès. Sur les banderoles, on pouvait lire : “Justice Mike” ou “Suspension des six policiers”. Le même jour, les collectifs ont envoyé une lettre aux autorités avec des revendications. Et le soir, ils ont organisé une manifestation à laquelle ont participé plus d’une centaine de personnes. La prochaine manifestation est prévue pour septembre. Le procès commencera peut-être à ce moment-là. Mais peut-être pas, car pour l’instant, même les charges contre les policiers ne sont pas connues. De plus, les policiers qui ont tué Mike sont toujours libres.

Le SEM interdit aux exilé·e·s de participer à des programmes de solidarité

Rompre l’isolement” - le slogan du Velotour d’Horizon a pris un tout nouveau sens au troisième et dernier jour de notre voyage de trois semaines à travers la Suisse. Après avoir visité des camps d’asile dans différentes régions et avoir établi des contacts avec des exilé·e·s et des groupes de solidarité, l’étape du Glaubenberg était au programme du 27 juillet. Le but : une visite au centre d’asile probablement le plus éloigné de Suisse. Le “Centre fédéral d’asile sans fonction de procédure” est situé à environ 1530 m d’altitude, à environ un demi-kilomètre du sommet du col, au milieu d’une zone touristique. Il est presque exclusivement accessible en voiture. Il y a un bus postal pour Sarnen au maximum quatre fois par jour, et en dehors de la saison principale, il n’y a pas de transport public du tout entre Sarnen et Glaubenberg. Une promenade de Sarnen à Glaubenberg prend au moins cinq heures. En outre, les résidents* ne sont autorisés à quitter le camp qu’avec des restrictions. Ils doivent être de retour au camp avant 17 heures.

dans les nouveaux centres d’asile fédéraux, seuls ceux qui demandent un permis spécial sont autorisés à entrer.

Après un trajet épuisant sous un soleil radieux, nous avons rencontré un groupe de personnes solidaires de la région sur le Glaubenberg, qui s’organisent depuis des années en faveur des habitant·e·s du camp. Lorsque nous sommes arrivés au camp, nous étions - comme prévu - devant des portes fermées : dans les nouveaux centres d’asile fédéraux, seuls ceux qui demandent un permis spécial sont autorisés à entrer. Mais, contre toute attente, les portes sont également restées fermées depuis l’intérieur. Nous avons attendu en vain que les résidents du camp puissent se joindre à nous pour le déjeuner, mais les employés de la société de sécurité Securitas n’ont pas laissé les exilé·e·s sortir du centre cet après-midi-là, sur ordre des autorités de migration. Cette mesure était apparemment liée à notre visite au Glaubenberg l’année dernière et à l’accusation d’avoir fait trop de bruit à cette époque. La conclusion de la journée d’hier est que la situation dans le camp de Glaubenberg est symbolique de la privation de droits, de l’administration et de l’isolement des réfugiés. Les couvre-feux, les règles du camp et la difficulté de contacter les groupes de solidarité font qu’il leur est impossible d’accéder à leurs droits fondamentaux", explique le blog du Velotour d’Horizon.

“Manifestation contre l’administration totale” à Lucerne

Lors d’une manifestation à Lucerne dans le cadre du Velotour d’Horizon, plus de 200 militant·e·s ont réclamé plus d’autodétermination pour les exilé·e·s et ont critiqué le système d’asile suisse, caractérisé par le contrôle des corps par autrui, et qui s’est encore aggravé avec l’ouverture des camps d’asile fédéraux en mars 2019. Ces camps fédéraux sont souvent très éloignés, comme par exemple en Suisse centrale sur le Glaubenberg. Des temps de présence stricts intensifieraient encore l’isolement et rongeraient la santé mentale des personnes hébergées dans ces camps.

Agenda (Envoyez votre événement à antira@immerda.ch)

Enough. Journées d’action sur les luttes migratoires et la résistance antiraciste

29 - 30.08.20 I Park Platz Zurich
Nous créons un espace pour rendre visibles les initiatives antiracistes et la résistance au système de migration. La migration et le racisme ne sont pas la même chose : ce sont deux phénomènes aux effets différents, mais ils se chevauchent souvent. Tous deux sont fondés sur des schémas de pensée post- et néocoloniaux qui ont des effets réels : dans le régime frontalier européen, ainsi que dans le racisme quotidien en Suisse ou la violence policière raciste dans le monde entier. La résistance antiraciste et les luttes pour la migration ont de nombreux aspects. Nous voulons les montrer : laisser les différents sujets se côtoyer et laisser les différentes approches des initiatives individuelles et des réseaux parler d’elles-mêmes.

P.S.

Revue de presse en entier sur le site antira.org

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