Le chef de l’État et du parti fasciste AKP, Erdoğan, a décrété un deuil national de trois jours et mis les drapeaux en berne après le massacre de l’hôpital arabe d’Al-Ahli en Palestine. Il est à juste titre dénoncé pour n’avoir pas dit un mot sur la coopération économique de la bourgeoisie turque avec Israël.
En quoi consistent donc ces relations économiques ? Sous l’AKP, le volume du commerce extérieur entre les deux pays a plus que quintuplé, atteignant 9 milliards de dollars. La Turquie est la partie prédominante de cette relation commerciale. Ce que la bourgeoisie turque exporte vers Israël est trois fois plus élevé que ce qu’elle importe d’Israël. En ce sens, Israël est le dixième partenaire d’exportation de la Turquie. Ce sont principalement des produits des secteurs de la métallurgie et de l’automobile que la bourgeoisie turque exporte vers Israël. Ces secteurs représentent la moitié des exportations vers Israël. La Turquie est également un partenaire commercial important pour Israël. La Turquie est le cinquième pays auquel Israël vend le plus de biens et de services. Une autre dimension des relations économiques est l’investissement direct étranger. Il y a plus de 500 entreprises en Turquie dont les partenaires ou les propriétaires sont israéliens. La présence de la bourgeoisie turque en Israël ne doit pas être sous-estimée. Les deux entreprises les plus connues et dont le volume d’investissement est le plus élevé sont Zorlu Holding de l’AKP et Yılmazlar Construction du MHP.
Les investissements de Yılmazlar Construction représentent 10 % du marché israélien de la construction. Il s’agit d’une part très importante pour une seule entreprise. En fait, la presse israélienne rapporte que la moitié des immeubles de grande hauteur de Tel Aviv ont été construits par Yılmazlar Construction. Zorlu, qui a connu une croissance rapide au fil des ans en s’alignant sur l’AKP, a investi plus d’un milliard de dollars dans l’énergie en Israël. Zorlu Holding détient des participations de 25 % et 42,15 % dans trois grandes centrales électriques en Israël. Les centrales électriques de Zorlu fournissent 7 à 10 % des besoins en électricité d’Israël. La coopération capitaliste entre Israël et la Turquie devrait être évaluée à la fois en termes de développement possible et de dimension actuelle. La Turquie aimerait faciliter le transport du gaz naturel israélien de la Méditerranée orientale vers l’Europe et même faire transporter le gaz jusqu’en Turquie. Le coût total du transport du gaz vers l’UE s’élève à 6 milliards de dollars. C’est pourquoi Erdoğan déclare : “Si le gaz israélien doit aller en Europe, il ne peut le faire sans la Turquie”, et à chaque occasion, il déclare que “l’itinéraire à travers la Turquie est le moyen le plus raisonnable de transporter les ressources d’Israël vers l’Europe”.
D’autre part, la rivalité impérialiste entre les États-Unis et la Chine et la nécessité de déplacer les chaînes d’approvisionnement vers des régions moins coûteuses dans un contexte de récession mondiale font de la Turquie un enfer de main-d’œuvre bon marché plus attrayant pour Israël (en particulier dans les secteurs de la métallurgie, de la chimie et de l’automobile) que la Chine. Israël est considéré comme un partenaire indispensable pour le capitalisme turc, qui a bâti sa stratégie de survie sur la participation à cette refonte des chaînes d’approvisionnement internationales, ce qui explique pourquoi il maintient les salaires en dessous du taux d’inflation et attaque de front toutes sortes de luttes syndicales.
En soutien à la lutte de libération palestinienne, il y a l’appel au boycott des consommateurs. Son effet est bien sûr indéniable. Cependant, le pouvoir de la classe ouvrière découle de sa place dans la production et non de sa place dans la consommation. Ici, la place dans la production n’est pas seulement à comprendre dans le sens de la grève, mais aussi dans un sens plus large et politique, comme l’intervention dans la production.
Par exemple, si seuls les travailleurs des secteurs de la métallurgie et de l’automobile entamaient une grève d’avertissement, le flux financier annuel de deux milliards et demi de dollars de la bourgeoisie turque serait interrompu.
Les représentants de l’État colonial turc se rangent avec des mots incendiaires du côté du peuple palestinien, mais ce n’est qu’une farce, étant donné les liens étroits entre la bourgeoisie turque et le sionisme. L’État sioniste et l’État fasciste-colonialiste turc sont tous deux des centres contre-révolutionnaires qui n’ont rien d’autre à offrir à nos peuples que le génocide, l’oppression et l’exploitation. Tous deux méritent leur place sur le tas d’ordures de l’histoire.
