Ce mois de juin 2021, renversé s’intéresse au Hip-hop. Ce mouvement culturel - populaire dans tous les sens du terme - traverse les époques puisqu’il est bientôt quinquagénaire. Qu’il reste underground, en marge à l’ombre du show-business ou qu’il trouve sa place jusqu’aux Victoires de la musique, le rap s’est imposé, sans rémission, telle une cerise sur le ghetto au panthéon des musiques les plus écoutées dans le monde. De mémoire, le hip-hop à toujours été indissociable de la contestation sociale. En effet, qui peut prétendre faire du rap sans prendre position ? Si ce n’est pas toujours aussi évident aujourd’hui, c’est du moins ce dont on va parler ici. Le rap qui lutte, qui a la rage, qui fuck les cops et qui met du coeur à l’outrage.
A cette occasion voici la première partie d’un petit dossier sur les procès emblématiques du Rap français.
NTM “POLICE”
En 1993, suite à la sortie de l’album de NTM “1993... J’appuie sur la gâchette” le parquet de Paris ouvre une enquête à propos de “Police”, un des meilleurs morceaux de l’album. L’affaire sera classée sans suite.
Deux ans plus tard suite à l’élection d’un maire FN à Toulon, SOS-Racisme organise « le concert des libertés » qui aura lieu le 14 juillet 1995 à la Seyne-sur-Mer, dans le Var. NTM y donne un concert mémorable devant 10’000 personnes et entre les morceaux ils lâchent "Nique ta mère, je nique la police, j’encule et je pisse sur la justice. Où sont ces enculés de bleus et la justice qui nous emmerdent toute l’année ?" ou lucidement "Les fascistes ne sont pas qu’à Toulon, ils sont en général par trois, ils sont habillés en bleu, ils ne sont pas loin derrière vous, à l’entrée. Vous voyez de qui je veux parler."
Les 30 policiers présents pour "assurer la sécurité" n’ont pas vraiment apprécié le concert alors ils ont porté plainte et en 1996 Joey Starr et Kool Shen sont mis en examens pour "outrage à personnes détentrices de l’autorité publique". En première instance les deux MC’s sont lourdement condamnés : 6 mois de prison dont 3 fermes ainsi que six mois d’interdiction « d’exercer la profession de chanteur de variétés ». Précisons que le juge était un ancien flic... En 1997, en appel la peine sera allégée et les deux rappeurs écoperont de 50 000 francs d’amende (environ 7 600 €) et deux mois d’emprisonnement avec sursis.
Ministère AMER "Sacrifice de poulet"
C’est également en 1995 que sort la compilation "La Haine, musiques inspirées du film", sur laquelle on trouve "Sacrifice de poulets" du ministère AMER. Un morceau puissant qui raconte une nuit d’émeute en banlieue parisienne.
Le groupe avait déjà fait parler de lui quelques années plus tôt avec "Brigitte femme de flic". Mais cette fois suite à une interview dans entrevue ou le ministère AMER affirme « On dit dans notre disque qu’il faut aller brûler un commissariat et sacrifier du poulet. Quoi de plus normal ? » et à la prestation du charismatique Kenzy dans ça se discute, le groupe s’attire une plainte d’un ministère bien moins sympathique : le ministère de l’intérieure. Finalement le ministère AMER sera condamné à une amende de 250’000 fr.
“C’est parce que nous on s’est rendu compte que à chaque fois que quelqu’un se fait tuer par la police, un jeune noir ou un jeune arabe, la solution qu’on proposait c’était soit le discours avec des policiers, pour nous il faut même pas y compter, soit des parties de foot. Nous on a dit non. Un lascar assassiné, deux poulets sacrifiés. Faites d’abord ça et après on verra.” Kenzy, ministère AMER
Passage de Kenzy à propos de sacrifice de poulets à 11:45.