Mais cette mécanique semble être rouillée. Le printemps dernier a connu un mouvement social particulièrement puissant, comme on n’en avait pas vu depuis longtemps. Un mouvement qui ne cachait pas son désir révolutionnaire. Depuis la rentrée, la conflictualité a pris de nouvelles formes : une fois de plus, les descendants de l’immigration post-coloniale, que la République voudrait museler, ont refusé de se taire. La famille d’Adama Traoré a fait de sa lutte un symbole du combat contre les crimes de l’État. Pour celui-ci c’est inadmissible, et emprisonner deux frères du défunt est une réponse à la hauteur de l’insulte. D’autant que ce n’est pas n’importe quelle cible qui est visée. C’est la police, protectrice de l’ordre social et racial, dont les méthodes sont directement héritées de celles utilisées dans les colonies. Cette même police dont la détestation, sentiment largement partagé dans des banlieues confrontées quotidiennement à ses crimes, se propage peu à peu dans d’autres sphères de la société.
Ainsi, la présidentielle apparaît de moins en moins assurée, la campagne de plus en plus artificielle, zombifiée, mort-vivante. Les signes de sa décomposition se multiplient. La Bretagne a mis le PS en PLS. Son université d’été, qui aurait marqué les retrouvailles du cortège de tête, a été annulée ; pendant l’automne, le pouvoir a multiplié les menaces de démantèlement de la ZAD, il n’a pas fait un pas ; dernièrement, Valls a annulé son meeting à Rennes par peur d’une confrontation enfarinée. Ce parti est moribond, le candidat qui émergera de sa primaire sous perfusion ne fera pas 10 %.
Mais il ne nous suffit pas de nous acharner sur le cadavre du PS. Attaquons-nous à ceux qui prétendent prendre sa place. Trois d’entre eux viennent parader à Lyon le week-end du 4 février. D’abord Macron, coqueluche des médias, prétendant incarner une nouveauté – laquelle ? Puis Le Pen, qui prospère sur les ruines de la mondialisation, l’héritage colonial de la République et le racisme d’État. Elle croit arriver en terre conquise : le fascisme, déjà bien installé dans le Vieux-Lyon, poursuit son implantation dans la ville. Le GUD a récemment ouvert un bar et une librairie anarchiste a été attaquée ; pendant ce temps, les agressions se multiplient en toute impunité. Enfin Mélenchon, pour qui le combat antiraciste est secondaire et l’islamophobie n’existe même pas, mais qui lance sa campagne à Lyon en même temps que Le Pen pour mieux apparaître comme son unique adversaire. « Votez pour moi, mais surtout ne prenez pas la rue ». D’ailleurs, la manifestation contre le FN envisagée par les partis sociaux-démocrates a été annulée par peur des débordements, par peur de la foule qu’ils ne peuvent plus contrôler. Cette gauche ferait bien de réviser ses classiques : « Il n’est pas de sauveur suprême, ni Dieu, ni César, ni tribun ».
La mobilisation contre la loi travail et son monde a confirmé l’émergence d’une nouvelle force politique autonome. C’est à la tête des manifestations qu’elle s’est affirmée, rassemblant tous ceux qui ne se satisfont plus des miettes, qui veulent tout, qui ne répondent plus de rien, qui sont ingouvernables. Face à l’apparente inéluctabilité des élections, à nous de nous retrouver, de nous organiser, et d’attaquer. Les cortèges de tête printaniers se sont trouvés une nouvelle cible : les présidentielles.
Ce week-end lyonnais est une première occasion à ne pas manquer. Il marque le lancement de la campagne pour les deux candidats qui entendent récupérer la contestation pour mieux la neutraliser. Mais le salut ne viendra pas d’en haut. Plus jamais nous ne déléguerons notre pouvoir. Ne votons plus, bloquons les meetings, sabordons les élections. Rendez-vous le 4 février à 11h place Raspail, en masse et déterminés, afin des les ridiculiser, et de montrer cette présidentielle sous son vrai jour : une pièce de théâtre.
Nous appelons tous ceux à qui la politique donne envie de gerber, tous ceux qui depuis 2012 veulent brûler 2017, à converger à Lyon les 4 et 5 février, pour marquer le début d’une autre campagne, une campagne de destitution de la classe dirigeante, une campagne contre la campagne.
A bas les présidentielles
2017 n’aura pas lieu