Écologie - Antiindustriel OGM

[Zurich] Compte-rendu de la manif anti-OGM à Zurich

La manifestation se voulait pacifique et elle le fut. Elle se voulait massive mais elle ne le fut pas. Peut-être une étape tortueuse vers une vraie pression contre les recherches OGM en Suisse ?

Zürich |

“Enfin une protestation large contre le champ d’essai d’OGM à Reckenholz !” aurait-on pu se dire en apprenant qu’une manif allait avoir lieu contre l’installation ultra-sécurisée d’Agroscope dans la banlieue zurichoise. Mais assez vite, malgré des revendications assez politiques (à défaut d’être vraiment radicales) et une volonté affichée d’exercer une “pression de la rue”, les organisateurs-trices ont multiplié les mises en garde contre d’éventuels fauteurs-euses de trouble susceptibles de rendre la manif un tant soit peu offensive. Ainsi, pour que les familles et tout un chacun puisse se “sentir à l’aise” de venir à la manif et écouter les nombreux-ses interventant-e-s internationaux, le site internet schreckenholz.ch était bardé de déclarations prévenant que “le service de sécurité interne collaborera étroitement avec la police et TOUTE personne qui causera des troubles devra répondre de ses actes” et que les extrémistes de droite comme de gauche, ainsi que les sectes, n’étaient pas bienvenu-e-s.

Au final, ni les familles ni les masses ne furent vraiment au rendez-vous, la “manifestation internationale” n’a réuni que 200 personnes environ. Quasi aucun média de masse n’en a parlé. Les “peacekeepers” ont laissé quelques “extrémistes” anarchistes coller des affiches le long du parcours, pendant que les discours parfois instructifs mais littéralement interminables berçaient les militant-e-s présent-e-s, qui finalement se rangèrent sagement dans le champ prêté par un agriculteur pour la kermesse finale. Comme cette dernière se déroulait en face du Protected Site (le champ d’essai où se trouvaient encore ces foutues patates “cisgéniques” même pas foutues d’attraper le mildiou pour que les apprentis sorciers puissent les évaluer), quelques brebis égarées voulurent s’approcher du but annoncé de la manif. Sans surprise, plusieurs fourgons de police veillaient au grain, suppléés par un des organisateurs de la manif pressé de rassembler le troupeau dans le périmètre qui lui avait été dévolu...

Au-delà de l’aspect pathétique de cet encadrement hystérique visant à domestiquer l’opposition, détaillant sur son site tout ce que le bon / la bonne militant-e peut faire (c’est-à-dire tout sauf de l’action directe), il reste à faire en sorte que cette manif n’ait pas été le point culminant de la nouvelle vague d’opposition aux OGM en Suisse. On peut l’espérer, car l’échéance de 2017 pour la fin du moratoire se rapproche, et car les militant-e-s d’autres pays craignent que leurs autorités ne s’inspirent du modèle suisse et multiplient les sites protégés (notamment en Allemagne selon un des intervenants). Mettre en échec la sécurisation de ces recherches serait vraiment un pas important dans la résistance aux biotechnologies agricoles. Mais on voit que manifester contre la recherche publique mobilise nettement moins que contre Monsanto. Si les organisateur-ices de la manif du 22 août n’ont pas vraiment donné un exemple inspirant de force et de détermination, vivement que d’autres trouvent les moyens de le faire !

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Texte de l’affiche :

GENTECH STOPPEN (stopper le génie génétique)

Parce que la recherche étatique ne fait que préparer l’introduction des OGM en Suisse. Parce que les plantes génétiquement modifiées ne servent que les intérêts des multinationales de l’agrobusiness. Parce que nous savons déjà que les contaminations et les catastrophes sanitaires sont inévitables avec les OGM. Parce que nous voulons une agriculture autonome et écologique. Parce qu’on nous tient à l’écart des questions de société qui sont traitées à un niveau purement technique et donc réservées aux experts. Parce que la seule manière de refuser vraiment les technologies qui asservissent le vivant est de les détruire.

(avec une belle image de tracteur qui ravage des grillages)

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Texte d’un tract distribué pendant la manif :

GEDANKEN HIN ZU EINER GENTECHFREIEN WELT

(réflexions en vue d’un monde sans génie génétique/sans OGM)
Il est clair pour nous que la lutte contre la technologie génétique est une nécessité. Nous pensons qu’il est important que chaque individu-e fasse sa réflexion sur COMMENT nous voulons mener de telles luttes, ce qui vaut non seulement pour les OGM mais est aussi une question fondamentale.
De même, la question de POURQUOI nous luttons contre les OGM est centrale. Ainsi chaque manipulation génétique et chaque brevet sur le vivant est une attaque directe contre les gens qui produisent leur propre alimentation, contre les paysan-ne-s et contre le vivant en général. Si nous n’empêchons pas ce développement, toute possibilité d’un approvisionnement alimentaire autonome sera rendue impossible. L’alimentation est la base de toute communauté, notamment la base d’un futur monde sans domination auquel nous aspirons.

Un coup d’oeil en arrière

En l’an 2004 eut lieu un petit essai en plein champ de blé OGM à Lindau (ZH). A l’époque aussi, une résistance se mit en mouvement, qui s’acheva avec le moratoire sur les OGM. Depuis, le mouvement semble être tombé dans un sommeil profond. Les essais passés à Pully et à Reckenholz ont cependant été combattus par de multiples petites initiatives comme des manifs, des conférences, des caravanes cyclistes ou des actions de sabotage. Mais il semble que pour de nombreuses personnes la soi-disant “victoire” du moratoire a induit une attitude “loin des yeux, loin du coeur”. Maintenant que le moratoire semble toucher à sa fin, les moutons endormis se réveillent à nouveau, de nombreuses organisations qui ont porté le moratoire reviennent à ce thème. Cependant les promoteurs des OGM n’ont pas dormi pendant les dix dernières années, NON ils ont disposé de beaucoup de temps et aussi d’argent, par exemple à travers le programme national de recherche PNR59, pour se préparer en vue de la fin du moratoire.

Un coup d’oeil en avant

Maintenant qu’un mouvement se forme à nouveau, il parait nécessaire d’apprendre des erreurs commises. Manifestement ce sont les éternelles mêmes organisations qui se pressent au portillon, celles qui ont déjà diffamé certaines formes de résistance par le passé et se sont lancés dans des compromis foireux avec la politique. Pendant le temps écoulé, la voie vers les OGM dans les champs a été aplanie.
Notre force réside dans la diversité de celles et ceux qui veulent vraiment vivre sans génie génétique, et nous devons comprendre que dans un mouvement nous sommes aussi des individus qui tiennent pour nécessaires des modes d’action complètement différents. Pourtant cela ne doit pas nous empêcher de lutter ensemble. Manifs, conférences, tracts, sabotages et autres peuvent parfaitement se compléter. Si nous ne nous courbons pas devant les autorités et ne négocions pas avec elles, nous pourrions découvrir des chemins qui pourraient nous mener bien plus loin que de seulement triompher des OGM...
Les organisations qui jouent les dirigeants du mouvement montrent leur vrai visage, elles prolongent le bras de l’Etat. A la place des flics nous voilà flanqué-e-s d’un soi-disant “service de sécurité indépendant” qui a pourtant la même fonction. Que tout le monde puisse participer est une fausse excuse pour exclure certain-e-s. Quiconque ne se contente pas de trainer ses savates et ne veut pas obéir aux dirigeants se voit exclu-e au nom des familles et des enfants, alors que ce sont justement les générations futures qui, à cause des éternelles mêmes erreurs vont souffrir de notre manque de détermination...
Il est évident que tout n’est pas simple quand on s’attaque aux intérêts de l’Etat et de l’économie, comme on le fait quand on veut vivre sans génie génétique. Tout d’abord nous devrions être conscient-e-s que ce sont précisément l’Etat et le capitalisme qui sont à considérer comme ennemis si nous voulons vivre libres et autodéterminé·e·s.

Et ce qui serait possible

Pour cela imagine que toute la manif s’auto-organise d’en bas, et laisse les faits parler, au lieu d’écouter les mots creux des administrateurs du mouvement. Beaucoup de choses seraient possibles, ainsi quelques grillages ne nous empêcheraient pas de détruire les plantes OGM. Ce serait de fait un véritable pas en vue d’un monde sans génie génétique.

Quelques anarchistes

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