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La Pologne bloquée par les manifestations après l’interdiction de l’avortement

Les manifestations se succèdent depuis jeudi pour faire reculer le gouvernement après la délégalisation quasi totale de l’avortement en Pologne.

Pologne |

En quoi la loi est-elle durcie ?

Pour la cinquième journée consécutive, la Pologne vit au rythme de la colère, après que le Tribunal constitutionnel, étroitement contrôlé par le parti ultra-catholique et nationaliste du PiS (Droit et justice), a déclaré jeudi l’avortement pour raison de malformation du fœtus, même « grave et irréversible », comme inconstitutionnel. Le jugement restreint ainsi le droit à l’avortement déjà parmi les plus restrictifs d’Europe aux seuls cas de danger de mort pour la femme enceinte et de grossesses résultant d’un viol ou d’un inceste et délégalise de fait l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans le pays.

Pancarte annonçant “mon corps, mon choix”.

D’après les données officielles, la Pologne, pays de 38 millions d’habitants, a enregistré en 2019 seulement environ 1100 cas d’IVG, dont l’écrasante majorité était autorisée à cause d’une malformation irréversible du fœtus. “La décision d’hier, c’est l’interdiction totale de l’avortement en Pologne, car 98% des IVG légales en Pologne concernent les malformations du foetus”, a indiqué vendredi Krystyna Kacpura, directrice de la Fédération pour les femmes et le planning familial. 

Selon des ONG, le nombre d’IVG pratiquées clandestinement en Pologne ou dans des cliniques étrangères pourrait atteindre près de 200 000 par an. 

“to jest wojna” : “c’est la guerre”

Manifs, blocages et « nique le PiS »

La colère a pris ces derniers jours, en dépit des restrictions sanitaires liées à la pandémie de Covid-19, des proportions et un caractère sans précédent.

Des dizaines de milliers de personnes sont sorties dans les rues un peu partout en Pologne et dans de nombreuse grandes villes d’Europe tous les jours depuis jeudi, et ce jusque tard dans la nuit.

Plusieurs milliers de personnes dans le centre-ville de Poznan.

Ce lundi, l’heure est au blocage de Varsovie par tous les moyens : en voiture, à vélo, assis ou allongé sur un passage piéton, au rythme des tambours et noyé dans des fumigènes rouges. A l’image de la capitale, c’est tout le pays qui se retrouve ainsi paralysé. Car le mot d’ordre, amplement relayé sur les réseaux sociaux, est national et sans ambiguïté : « C’est la guerre. » Le programme est tout aussi clair : grève des femmes, grève générale, manifestation dans la capitale de femmes venues de tout le pays.

Des personnes ont accroché des cintres, symbolisant les avortements illégaux, à la porte d’un bâtiment du clergé de l’église catholique à Wroclaw.

La foule, scande des slogans anticléricaux et antigouvernementaux. “Nique le PiS”, “PiS dégage”, “Grève des femmes” ou “C’est la guerre”, proclamaient les appels à manifester, zébrés d’un éclair rouge devenus symbole de cette mobilisation. Des pancartes et banderoles brandies par les manifestants réclament également un référendum sur le sujet. Des graffitis sont apparus en nombre sur les murs et les trottoirs des villes. Les éclairs rouges et les slogans féministes s’inscrivent dans le paysage, les vêtements, les affiches, aux fenêtres des appartements et des voitures. Et c’est à coup de gaz lacrymogène que certains rassemblement devant la résidence de Jaroslaw Kaczynski leader du parti ultraconservateur au pouvoir (PiS), ont été dispersés.

Messages entouré de l’éclair rouge “avec les femmes tu vas perdre”.

La lutte continue et les prochains jours pourraient être décisifs pour faire reculer le gouvernement comme en 2016, où une forte mobilisation populaire avait mené à l’abandon d’un précédent projet de réforme contre l’avortement.

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