Répression - Enfermement ADN

Une militante qui dérange

La stratégie de criminalisation des organisations sociales n’est pas nouvelle. Les leaderEs sociaux sont persécutées via ce que l’on appelle les faux positifs judiciaires. Des cas dans lesquels l’Etat utilise des preuves fabriquées et de fausses accusations pour constituer des dossiers judiciaires contre des militantes et défenseurEs des droits humains en les accusant généralement d’avoir des liens avec la guérilla.

Colombie |

Dans le cas du Congreso de los Pueblos, les poursuites judiciaires constituent la principale stratégie de persécution à leur encontre, avec plus de 50 personnes actuellement privées de liberté. En 2018, Julián Gil, secrétaire technique, a été arrêté puis acquitté fin 2020, en décembre 2020, un procès a été ouvert contre les leaders paysans Teófilo Acuña, Adelso Gallo, et Robert Daza, qui ont été arrêtés et attendent désormais d’être jugés en liberté. Des arrestations massives de dirigeants ont également été signalées à Nariño, Valle del Cauca, Arauca, Casanare, Antioquia et Bolívar. En mars 2021 c’est entre autre Erika Isabel Prieto qui est recherchée.

Le Comité de solidarité internationaliste de Saragosse dénonce la persécution judiciaire et militaire de la défenseuse des droits humains Erika Isabel Prieto par l’État colombien.

Erika Isabel Prieto Jaime est une défenseuse des droits humains colombienne et une dirigeante du Congreso de los Pueblos. Malgré sa jeunesse, elle a un long parcours, d’assistante parlementaire à l’activisme dans les mouvements sociaux. Il existe actuellement un mandat d’arrêt à son encontre, demandé par le parquet de Bucaramanga, qui n’a pu être effectif, car elle participait à une session de formation au moment où elle devait être arrêtée.
Le mandat est fondé sur la déclaration d’une “source humaine” et sur des rapports des renseignements militaires. Pourtant, lors des audiences des autres arrestations effectuées dans le cadre de la même procédure, ces éléments ont été déclarés illégaux par le juge, considérant que ces matériaux ne sont pas suffisants pour justifier une arrestation et que le bureau du procureur a violé les droits fondamentaux de ces personnes.

Erika Prieto, manifestation en plein confinement, contre l’évacuation d’un terrain occupé mai2020

La Congreso de los Pueblos a dénoncé le fait que l’armée, de la base militaire de Cantagallo, a publié une photographie de Prieto mentionnant qu’elle fait partie d’un groupe armé, violant ainsi la présomption d’innocence et surtout mettant sa vie en danger. Dans la région où elle travaille, le sud du département de Bolívar, le conflit armé est intense, il y a une forte présence de groupes armés irréguliers et de paramilitaires. Cette stigmatisation publique la convertit en cible pour ces groupes.
Les membres du Comité de solidarité internationaliste de Saragosse étaient physiquement avec Erika pendant la pandémie dans de nombreuses situations lors desquelles elle a dénoncé le terrorisme d’État, les féminicides et la criminalisation de la protestation sociale. Au début de l’urgence sanitaire, nous étions avec elle devant la prison de la Modelo, après que l’État ait massacré 23 prisonniers, accompagnant leurs familles.
(https://renverse.co/infos-d-ailleurs/Massacre-dans-les-prisons-en-Colombie-2489)
https://renverse.co/infos-d-ailleurs/Video-Massacre-dans-les-prisons-en-Colombie-2495

Pendant la crise du covid-19, elle s’est portée volontaire pour apporter une aide humanitaire dans les quartiers les plus abandonnés de la capitale (Ciudad Bolivar) et aux familles pauvres du quartier des Mártires (migrants vénézuéliens, travailleurEs du sexe et toxicomanes). À Altos de la Estancia (un autre quartier vulnérable), elle a conseillé les habitantEs sur la manière de défendre leurs droits contre le maire Claudia López, qui voulait les expulser en profitant de l’agitation ambiante due au covid.
Devant l’ambassade des États-Unis, elle a exigé la défense de la souveraineté nationale contre l’ingérence militaire et contre les assassinats des personnes noires par la police aux Etats-Unis comme en Colombie. Lors des manifestations étudiantes, elle a accompagné les primeras lineas (premières lignes) qui se tenaient entre les manifestants et la police afin que celle-ci n’attaque pas les étudiantEs. Elle a également pris la tête de la marche qui a traversé le pays, de Barrancabermeja à Bogota, pour demander, entre autres, l’arrêt des poursuites contre les leaderEs sociaux.
En bref, elle ne reste pas immobile. Mais rien de ce qu’elle fait n’est lié aux groupes armés, comme le prétend le gouvernement. Au contraire, elle défend les droits humains et se bat pour le féminisme, pour les droits des animaux, qu’elle recueille régulièrement en ville et dont elle prend soin chez elle, avant de les donner en adoption.

Erika est le prototype du défenseurE des droits humains. Le bureau du procureur général et le gouvernement colombien, via leurs poursuites, semblent plus préoccupés par la persécution de la pensée critique et de la dissidence que par stopper les massacres qui frappent le pays.

Comité de solidarité internationaliste de Saragosse https://internacionalistas.net/

texte original : https://www.elperiodicodearagon.com/espacio3/2021/04/21/activista-incomoda-48525549.html

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