Migrations - Frontières

[Genève] Communiqué du 29.3.15 du collectif Sans Retour concernant le renvoi de Ayop

“Soyez enfin réalistes, demandez l’impossible...”, communiqué du collectif Sans Retour en date du 29.03.2015 au sujet du renvoi de Ayop.

Genève |

Jeudi 26 mars au matin, la police genevoise a tenté d’expulser Ayop de Suisse. Son refus d’accepter docilement son renvoi l’a conduit, dès le lendemain matin, devant le Ministère public. Il a dû répondre d’une plainte des exécuteurs de l’ordre, les policiers. Dans la foulée, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) a prononcé une interdiction de pénétrer sur le territoire Suisse jusqu’en 2018. Depuis sa décision d’expulser Ayop début mars, plus de 700 personnes ont participé aux différents rassemblements de soutien. Les trois derniers jours qui ont suivi son arrestation, pas une journée n’a passé sans que des centaines d’individus expriment leur dégoût du traitement qu’il subit. Ce samedi 28 mars, près de cent personnes frappaient joyeusement les murs de l’enceinte de Champ-Dollon qui abrite la Favra, centre de détention où est enfermé Ayop.

Ayop a 19 ans. Il est l’une des quarante victimes de l’incendie du foyer des Tattes qui a fait un mort en novembre 2014. Mais qu’il soit jeune, que son casier judiciaire soit vierge, ou qu’il souffre des suites de sa chute du troisième étage pour échapper aux flammes ne doivent pas être les motifs de s’opposer à son renvoi, aussi méprisables qu’ils soient. Ne jouons pas encore une fois le spectacle du bon et du mauvais migrant pour les flatter les xénophobes humanistes.

Chaque renvoi évité sera toujours fêté comme une juste victoire. Mais toutes les non-entrées en matière (NEM), prononcées pour la moitié des demandes d’asile, chaque renvoi forcé d’un migrant entravé comme une bête dans un avion complice, chaque justification portée par un racisme décontracté et chaque jour à regarder des politiciens dits de gauche participer activement à la création d’une Suisse concentrationnaire n’auront de cesse de nous dégoûter. Nous mettrons tout en oeuvre pour qu’Ayop puisse rester, mais nous refusons d’avance qu’on en fasse le porte étendard de l’État de droit ou d’un quelconque respect des vraies valeurs de la République.

L’État renvoie depuis cet automne les victimes des Tattes, témoins embarrassant de sa responsabilité dans le sinistre. Il enferme les sans-papiers à Champ-Dollon, les réfugiés sous terre dans des bunkers ou en prison à Frambois. Ce qui tient aujourd’hui lieu de politique d’asile et d’accueil des réfugiés est une application aveugle des législations fédérales et la gestion de ses conséquences. Il y a moins de demandes d’asile aujourd’hui que dans les années 90. Mais les gouvernements cantonaux ont fermé les lieux d’accueil sur la base des estimations du nombre de demandes d’asile à venir de Christophe Blocher. Quelques années plus tard, les accords de Dublin légitimaient la Suisse dans sa mise en place d’une machine de tri au renvoi des migrants. Tout en laissant faire à la droite le sale boulot, la seule stratégie d’action des partis de la gauche institutionnelle a été de crier vaguement au loup, en se gardant bien de risquer sa crédibilité électorale sur le terrain miné de l’accueil des étrangers.

Comment juger le réveil des élus indignés, alors qu’Ayop est en prison, que l’Hospice général continue de mentir aux réfugiés des bunkers, que presque tous soutiendront les nouveaux centres fédéraux en saluant les économies pour le Canton. Les premières victimes sont toujours les plus vulnérables, ceux dont presque tout le monde se moque. Que reste-t-il aujourd’hui de l’indignation politicienne qui avait suivi l’homicide du requérant d’asile nigérian Joseph Ndukaku sur le tarmac de l’aéroport de Zurich au cours d’un vol spécial, il y a tout juste 5 ans, le 17 mars 2010 ? De toute façon, ils ne votent pas. Nous refusons d’assister passivement au match de tennis entre le Conseil d’État et du SEM, chacun refusant de communiquer sur le cas d’Ayop.

  • Nous exigeons la sortie d’Ayop de détention et l’assurance qu’il puisse rester en Suisse s’il le désire.
  • Nous exigeons l’arrêt immédiat des renvois Dublin par le gouvernement genevois et la fermeture sans délai des centres de détention administrative.
  • Nous exigeons également la fermeture directe des abris PCi dévolus aux logements des requérants d’asile et la réquisition des dizaines de milliers de mètres carrés de locaux commerciaux laissés à la spéculation pour loger les personnes dans le besoin.
  • Nous exigeons que le Conseil d’État reconnaisse publiquement que la Suisse et le Canton de Genève en particulier doivent leur richesse à l’exploitation frénétique des pays pauvres auxquelles se livrent les entreprises et organisations qu’ils accueillent depuis des décennies.
  • Et à ceux qui nous trouveraient irréalistes, grossiers ou irrespectueux, nous répondons qu’ils peuvent se joindre au Conseil d’État in corpore, dont nous exigeons finalement de ces membres qu’ils traversent nus et enduits de chocolat la ville de Genève sous les huées de la foule.

“Soyez enfin réalistes, demandez l’impossible...”

Sans Retour, collectif autonome genevois qui se mobilise autour des thématiques de migration

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