Culture - Contre-culture Police Fête sauvage

[Genève] RAVES. Pour faire durer les festivités

Samedi 1er avril, nous sommes allé.e.s à une fête sauvage organisée dans une grotte au pied du bois de la Bâtie. Quand nous arrivons sur les lieux, il est environ 2h du matin, et la police est déjà sur place, deux voitures – dont une banalisée – sont garées sur le parking du Théâtre du Galpon.

Genève |

On trouve le chemin en suivant des gens qui montent la colline. À l’extérieur, aucun bruit. À l’intérieur, la fête bat son plein, 300 personnes dansent sur de la techno, le dispositif installé par les organisateur.trice.s est simple et minimal : sound-system et lumière laser ; tout est réuni pour une super nuit.

Une vingtaine de policiers sont mobilisés, cinq d’entre eux s’introduisent dans la grotte aux environs de 3h du matin. Ils remontent en file jusqu’au DJ, torches en main, sous les huées et sifflements de la foule. On entend quelques ‘tout le monde déteste la police’ et quelques pichenettes heurtent le crâne chauve de l’agent qui ferme la marche. Les flics se rendent derrière la table du DJ, et procèdent à des contrôles d’identité. Ils quittent les lieux sous les cris des danseur.se.s – puis la musique s’arrête ; la fête est terminée.

Une participante interpelle le public en l’appelant à rester pour protéger le matériel mais les organisateur.trice.s semblent ne pas avoir besoin d’aide. La foule se disperse et redescend de la colline puis quitte les lieux. Quatre voitures de police plus une banalisée et une rangée de policiers postés en bas du parking, bras croisés et attitude de cowboy, s’assurent de ne pas passer inaperçus. Ils ont cru nous donner une leçon, mais au contraire, ils nous ont inspiré.

Quatre voitures de police plus une banalisée et une rangée de policiers postés en bas du parking, bras croisés et attitude de cowboy, s’assurent de ne pas passer inaperçus. Ils ont cru nous donner une leçon, mais au contraire, ils nous ont inspiré.

Depuis environ trois ans, de mai à septembre, une quantité non négligeable de fêtes sauvages sont organisées dans la région. Elles sont le fruit de la détermination et de l’organisation de quelques collectifs. Il est clair, vu l’affluence à ces soirées, que certains publics désertent les lieux de fête traditionnels, commerciaux et policés, et optent pour une forme de fête plus libre, sans service de sécurité ni prix d’entrée.

L’attitude des autorités face à ces mobilisations éphémères est difficilement prévisible : certaines fêtes ont duré, d’autres se sont arrêtées rapidement. Ce qui paraît aujourd’hui crucial, c’est que ces moyens de réappropriations de l’espace publique perdurent. On a vu l’été dernier des fêtes réunissant plus de 2’000 personnes (Rhône 2016). La récurrence de ces fêtes sauvages indique clairement une volonté de la jeunesse de se libérer du carcan capitaliste imposé par le commerce de la nuit. Même si ces fêtes ne revendiquent pas d’agenda politique précis, il s’agit clairement d’actions à caractère subversif : elles participent aux tentatives d’émancipation d’une jeunesse face à une société trop normée qui n’envisage la fête qu’à travers le prisme de la rentabilité économique. Voulue ou non, la fête sauvage est une manifestation de résistance collective. Cette notion de résistance implique nécessairement de la solidarité, c’est ce qui semble manquer à l’arrivée de la police. En tant que participant.e.s à ces raves, nous avons souvent pu témoigner d’une désolidarisation avec les organisateur.trice.s. Ces moments ne peuvent pas se réduire à une simple forme de consommation, c’est pourquoi nous espérons qu’à l’avenir, les participant.e.s et les organisateur.trice.s sauront se saisir de ces énergies collectives pour des fêtes impossibles à arrêter. À l’arrivée de la police, les organisateur.trice.s et les participant.e.s forment un bloc indivisible : ces espaces doivent devenir des forteresses imprenables par les forces de l’ordre.

Si dans ces rassemblements illégaux nous sommes potentiellement tou.te.s hors la loi, il en revient à la responsabilité de chacun.e.s de développer des outils pour contrer la répression, ensemble. Il est inconcevable pour nous que les collectifs organisateurs continuent à être les seuls à casquer. Nous pensons que les organisateur.trice.s ne devraient pas payer seul.e.s les amendes. Nous pensons d’ailleurs que personne ne devrait jamais payer d’amende.

Ce week-end, nous avons vu une jeunesse qui a envie de faire la fête, de se retrouver hors des sentiers battus, et qui, pour ce faire, défiera l’autorité.

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