Malgré la véritable réussite du tournoi, nous sommes scandaliséEs par ces procédés, c’est à nous qu’on a menti, c’est nous qui avons été intimidéEs par des pratiques politico-policières abjectes.
Un tabou entoure les centres fédéraux, spécialement lorsqu’on les aborde avec une perspective antiraciste. On a la douce impression de se faire mener en bateau. De se faire censurer avec de vieux relents paternalistes. Si l’on ne peut parler des conditions d’accueil des personnes en exil et en particulier les centres fédéraux, si l’on ne peut parler des violences policières à l’encontre des personnes non-blanches, quel antiracisme nous reste-t-il ? Celui de Maudet et de la FiFA ? Celui qui fait fi des rapports de dominations systémiques ? Cet antiracisme moral qui brasse de l’air et donne bonne conscience ?
L’antiracisme politique se doit de se saisir des thématiques des violences systémiques à l’égard des personnes non-blanches et des conditions d’accueil des personnes en exil. C’est ce que le tournoi antiraciste fait, fera et continuera de faire.
Les centres fédéraux de départ sont destinés à des personnes non-blanches issues de pays non occidentaux. Comment ne pas analyser cela à travers le prisme de l’antiracisme ?
La situation actuelle en Suisse Romande et plus particulièrement à Lausanne est catastrophique. Vindicte populiste et violences policières à l’égard des personnes noires dictent le quotidien de la capitale vaudoise. Comment ne pas analyser cela à travers le prisme de l’antiracisme ?
La succession de pratiques antidémocratiques de la part des autorités qui a accompagné l’organisation du tournoi est scandaleuse. Se rendre incriticable est symptomatique d’une société gravement malade. Cela nous attriste, mais renforce notre détermination. La susceptibilité des
autorités autour de ces questions nous rassure quant à leur pertinence.
Il n’y a que la vérité qui blesse. Seule la lutte paie.
Chronologie
Le 25 juin, le Collectif tournoi antiraciste reçoit un courriel de la Commune de Vernier nous proposant d’utiliser leur terrain à Aïre. Nécessitant seulement l’autorisation formelle de la police municipale de Vernier. Le lendemain matin, le 26 juin, deux membres du collectif se rendent à la police municipale. La demande d’autorisation est signée et la police nous énonce que nous pouvons diffuser l’information que le tournoi aura lieu au stade d’Aïre. Dans l’après-midi, soulagé d’avoir eu une proposition de stade à 5 jours de la date du tournoi, le collectif appelle la Police municipale pour s’informer de l’avancement de la procédure. Le policier que nous avions vu le matin nous accuse d’avoir caché qu’il s’agissait d’un tournoi antiraciste, d’avoir caché que nous avions eu une conférence de presse. Énervé, il ne laisse pas parler la membre de notre collectif qui essaye de dire que :
- Le nom du Collectif « tournoi antiraciste » se trouve dans la demande d’autorisation remplie le matin
- a commune de Vernier qui valide notre demande, sous réserve de l’autorisation, est elle tout à fait au courant des thèmes de notre tournoi.
- Que nous avons choisi de rendre ces violations de notre liberté d’expression publique et que donc par ce geste, loin de nous l’envie de tromper qui que ce soit.
- Le policier se scandalisant de la thématique antiraciste de notre tournoi répète sans cesse « je ne veux pas vous écouter », « vous nous avez menti » en disant qu’il annule toute autorisation et qu’il va contacter les magistrats.
On commence gentiment à être au bout de nos forces au collectif... Finalement un Magistrat nous rappelle pour dire que tout est réglé. Deux sentiments nous traversent à ce moment.
- La joie d’avoir finalement la confirmation que ce tournoi aura lieu et la joie de savoir que l’on pourra parler du Centre fédéral.
- La crainte qu’un policier municipal avec ses opinions personnelles ait un tel pouvoir.
Car en effet, nous avons réussi à contacter un Magistrat mais qui sait ce qu’il se serait passé, avec le peu de temps devant nous, si nous n’avions pas réussi à le joindre... Un policier et son mécontentement sur le terme « antiraciste » aurait-il suffi à faire annuler un évènement avec lequel pourtant la commune était au clair ?
Finalement le Magistrat nous confirme la tenue du tournoi, explique que c’était un mal entendu. La membre du collectif le contactant lui demande explicitement, pour que plus aucun mal entendu ne puisse voir le jour, si c’est bien clair que l’on peut parler des Centres-fédéraux.
Enfin.
Et pourtant...
Le Jour J
- Menace d’arrêter le tournoi en fin de matinée pour cause d’une banderole, que des participants avaient amenée, affichant « Pas d’impunité pour les meurtres policiers. Justice pour Mike et tou.x.te.s les autres » par un politicien verniolan dans l’organigramme du stade, président du conseil municipal.
- Venue de 2 policierEs municipaux en début d’après-midi pour venir nous demander d’enlever la banderole où il était inscrit « Pas de centre fédéral au Grand-Saconnex, ni ailleurs ».
2a. La policière la prend en photo.
2b. Pendant ce temps, le Collectif réussi à joindre le Magistrat (un samedi c’était pas gagné) et lui passe le policier municipal pour que le Magistrat lui confirme que l’on a effectivement le droit de parler de centre fédéral... - Le même politicien a tenté pendant plus d’une heure, estimant que nous « dépassions les limites » avec la banderole contre les centres fédéraux, de nous convaincre de la décrocher. La même que celle sur laquelle les polici.er.ère.s s’étaient trompé.e.s plus tôt dans la journée. Nous poussant à nouveau à justifier notre légitimité à la garder et à négocier un fait déjà acquis et au centre de notre déménagement et de la tenue de ce tournoi à Vernier.