Contrôle social - Surveillance

[Suisse] Panorama de la surveillance

En plus d’une nouvelle loi sur le renseignement, c’est d’une nouvelle loi sur la surveillance dont va bientôt se doter la Suisse. Avec plein de nouvelles surprises technologiques pour mieux t’espionner.

Suisse |

Les chiffres de la surveillance

En 2014, le nombre de mesures de surveillance enregistrées dans la statistique [1] - 14’484 - a légèrement diminué, 10% de moins qu’en 2013. En revanche, entre 2000 et 2014, le nombre de mesures de surveillance a été mutliplié par 4, passant de 4’000 par année à 16’000 par année. C’est le Canton de Genève qui possède la palme de la police la plus fouineuse puisqu’elle surveille plus de 4 fois plus que celle des autres cantons. Environ 2000 personnes sont sous le coup de mesures de surveillance à Genève. Plus largement en Suisse, ce sont 12 personnes par 10’000 habitants qui sont surveillées. C’est un sacré business pour les entreprises de téléphonie qui font payer leur collaboration au prix fort.

Cette massification de la surveillance n’est pas une particularité locale. La mode est à la surveillance généralisée à l’échelle de la planète. Le scandale qu’avaient provoquées les révélations par Edward Snowden sur les différents programmes d’espionnages de la NSA semblent n’avoir eu qu’un seul effet : tous les pays qui n’avaient pas de tels programmes jusque-là se sont mis en tête de les développer. Tout récemment, profitant du fameux esprit “Je suis Charlie” qui s’est saisi de la nation française, le parlement d’outre-Foron a accepté une nouvelle loi sur le renseignement dans laquelle la fin semble justifier tous les moyens. Et la Suisse - ce supposé ilôt de neutralité et de secret bancaire - ne fait pas exception à ce mouvement mondial pour plus de surveillance.

Ainsi, en sus d’une nouvelle loi sur le renseignement, c’est d’une nouvelle loi sur la surveillance dont est en train de se doter la Confédération helvétique. Cette loi donne une base légale à l’usage de certains outils technologiques qui vont accentuer la surveillance totale des télécommunications en Suisse.

L’arsenal du parfait espion

Quels outils sont - ou seront - à la disposition des services de police et de renseignement helvétiques pour vous espionner ?

En surveillance active - en temps réel, l’État peut écouter vos conversations sur téléphone fixe et mobile, connaître votre localisation, lire vos SMS, suivre votre usage d’Internet sur votre mobile, lire vos emails et observer votre comportement sur Internet sur votre ordinateur aussi, ouvrir et lire votre courier postal. Rétroactivement, l’État peut prendre connaissance de l’historique de vos conversations téléphoniques des six derniers mois - et bientôt des 12 derniers mois - ainsi que des données que vous avez transmises à votre opérateur téléphonique, tout comme votre IMSI (n° propre à chaque carte SIM) ou IMEI (n° propre à chaque appareil), les codes PUK et PUK2 de votre carte SIM, etc. Et c’est la même histoire pour la surveillance de votre boîte mail. Pas grand chose n’échappe aux grands yeux et oreilles de l’État.

Concrètement, les polices suisses commencent par exemple à s’équiper d’IMSI catchers. Ces appareils se font passer pour des antennes relais de téléphonie normales et permettent d’écouter les conversations de celui ou celle qui a le malheur de s’y connecter. La police cantonale de Zurich possède deux de ces dispositifs.

Le dernier dada des espions d’État helvétique est d’acheter ou de développer un Cheval de Troie - trojan - fédéral. Ce programme pourra être installé sur les machines des personnes surveillées. Il permettra de suivre les faits et gestes informatiques de l’utilisateur, d’allumer sa caméra ou son micro, et aussi de contourner certains protocoles de chiffrage des communications - comme celui de Skype par exemple. Le recours a ce type de logiciels par la police fédérale a déjà eu lieu par le passé. Inscrire une telle technologie dans la loi, c’est prendre acte de pratiques policières illégales plutôt que de les condamner.

La vie des autres

Mais au-delà de la surveillance de cas particuliers dans le cas d’enquêtes ou de missions de renseignement, la Suisse a aussi développé son petit système de surveillance des communications satellites par mots-clés. Il ne s’appelle pas Echelon, il ne s’appelle pas Prism, non, il s’appelle Onyx. Enfin, ce n’est pas un nouveau système non plus. Cela fait des décennies que les antennes géantes sur la route de Loëche en Valais surveillent les communications satellites pour le compte de l’armée - avec transmission au Service du renseignement de la Confédération. Mais aujourd’hui, ce projet de surveillance peut faire son coming-out grâce à l’introduction de « l’exploration du réseau câblé » dans la loi, et rêver à un radieux avenir où les réseaux à fibres optiques seront eux aussi surveillés [2].

À moins d’un coup de théâtre, la nouvelle loi sur la surveillance devrait être acceptée par les deux chambres du parlement lors de la session d’automne - à la mi-septembre 2015. Cela nous laisse juste assez de temps pour apprendre quelques techniques pour affronter la surveillance

Autodéfense numérique

Ce panorama laisse peu d’espoir quant à l’avenir des libertés individuelles en Suisse. Il faut dire que l’histoire des attaques contre ces libertés est déjà assez gratinée. On peut se souvenir du scandale des fiches ou de l’affaire Cincera. Ce qui faisait hurler au loup il y a encore 20 ans est aujourd’hui largement accepté par l’ensemble de la classe politique au nom de la défense contre le terrorisme, ou du développement de la cyberdéfense suisse. Le 11 septembre 2001 et ses suites sont passés par là. Il faut dorénavant s’attendre à être espionné, quoiqu’on fasse, qui que l’on soit. Certaines solutions techniques existent cependant pour minimiser les risques de surveillance. Voilà une liste de ressources pour se défendre contre la surveillance généralisée :

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