Plus de 4 ans après la mort d’Hervé Mandundu, tué sous les balles de la police cantonale vaudoise, le procès aura finalement lieu. Rappelons les faits. La nuit du 6 au 7 novembre 2016, 5 policiers intervenaient dans l’immeuble d’Hervé, suite à un appel pour tapage nocturne. Selon la version policière, Hervé les aurait agressés pendant son interpellation, ce qui aurait justifié que l’un d’entre eux - le caporal - lui tire à moins d’1m de distance trois balles dans le corps dont deux lui seront fatales. Les voisins d’Hervé ont démenti la présumée agressivité de la victime lors de l’intervention. C’est donc dans ces circonstances improbables que l’intervention de cinq agents de police entrainés et diplômés aura lieu. Cinq agents face à Hervé dans cet immeuble, qui en mourra. Il était seul, âgé de 27 ans, et père d’un jeune enfant.
Ce n’est que le lendemain matin, le 7 novembre aux alentours de 10h, que des agents de police viendront annoncer la mort d’Hervé à ses parents. Après ces évènements dramatiques, la communauté congolaise et leurs soutiens ont manifesté dans les rues de Lausanne pour dénoncer le racisme et le profilage racial imprégnant cette affaire. Cette mobilisation a rassemblé plus de 1000 personnes. Les revendications étaient claires : le droit à la vérité et la justice, contre les crimes policiers. Cette mobilisation a marqué un soutien pour toutes les victimes de violences policières et leurs proches, sous la pluie de slogans scandés par les manifestant·e·x·s : la vie des noir·e·x·s compte. Un an après la mort d’Hervé, la famille nous a livré un témoignage poignant :
« C’est vraiment trop long une année, nous n’avons même pas de réponse. Ce qui nous touche, ce qui nous fait mal surtout, c’est qu’on a reçu aucune visite des autorités, même pas un courrier pour avoir au moins de nos nouvelles. »
« Ce qui me fait peur c’est de voir combien de familles subissent ça, et ce que la police a semé dans la vie de nos enfants et les répercussions sur le long terme. On ne peut pas faire notre deuil. Le policier, il vit sa vie, il travaille et nous on est là, on est condamnés, on attend. On est là, comme des animaux quoi. C’est lui qui a plus de valeur que nous, c’est le policier. »
Aujourd’hui, la situation reste inchangée, les parents d’Hervé restent toujours sans réponse ni contact officiel. Depuis l’annonce du procès, seuls quelques éléments de l’enquête, dont une nouvelle version policière ont été relayés par les médias : cette nouvelle version justifierait selon eux le meurtre de Hervé. Ses parents apprennent ainsi, tout comme nous, les avancées de l’affaire en lisant les journaux, sans aucune médiation à propos de la mort de leur fils de quelconque autorité.
Les parents ont pu lire – comme nous – le procureur de l’instruction relever dans le 20 minutes que les agents de la police du Chablais, équipés de gilets pare-balles et de gants pare-couteaux, n’ont pas fait usage de leurs bâtons tactiques ni de leurs sprays au poivre. Ainsi, la police a préféré sortir une arme létale avant d’utiliser les violents outils procurés par la police qui auraient pu éviter son meurtre.
La reconnaissance des violences policières dans les discours médiatiques relève en effet de l’exception alors que la diabolisation de leurs victimes, des hommes noirs ou racisés, reste la règle. Pour Mike Ben Peter, comme pour Hervé Mandundu, la police s’est empressée de relater aux médias que leur victime était sous substances ou alcoolisée, avant même que le rapport toxicologique ne soit sorti. Sans aucun respect pour les proches, ils salissent la mémoire de nos victimes auprès de l’opinion publique afin de se dédouaner de leurs meurtres abjects.
Nous avons rencontré à nouveau la famille de Hervé. Celle-ci a bien compris le jeu des médias :
« C’est ça, Mike c’est la même chose avec Hervé ! Ils ont dit ça aussi, qu’il était drogué, qu’il était alcoolisé… C’est leur façon d’accuser quelqu’un qui est innocent. Parce que quand tu ne trouves rien, il faut dire quelque chose. On l’accuse devant le monde, devant les gens. En vérité, Hervé il est pas comme ça. Nous on connait notre fils. On connait Hervé. »
Malgré que ces longues années d’attente aient impacté leur santé, la famille est maintenant prête et confiante pour le procès.
« Nous sommes prêts. Nous sommes prêts. On a rien à perdre. On a perdu déjà Hervé. »
Du 23 au 25 mars aura lieu le procès sur la mort d’Hervé Mandundu à huis clos, le Caporal mis en cause devra y répondre de ses actes devant une cour criminelle. Nous espérons que les autorités rendront justice et dignité à Hervé ainsi qu’à sa famille, et que la condamnation ne protègera pas encore une fois la police, le bras armé de l’Etat.
Nous le dirons jamais assez, dans la communauté congolaise un enfant n’appartient pas à ses parents, mais à toute sa communauté. Ce soir-là, Hervé Mandundu mourrait tué par la police, cela fait quatre ans que toute une communauté est en deuil.
Justice et vérité pour Hervé
Justice et vérité pour Mike
Justice et vérité pour Lamine
Justice et vérité pour toutes les victimes de violences policières
Outrage Collectif