Dans un contexte de montée des forces réactionnaires, et notamment de la transphobie, partout en Occident, la production de savoir n’est pas neutre. À l’heure où l’existence même des personnes trans est en passe de devenir illégale dans plusieurs États des États-Unis, les discours qui prétendent vouloir “alerter sur les dérives du transgenrisme” ne sont ni plus ni moins que des offensives à l’encontre du droit fondamental de vivre (décemment) des personnes trans.
Le contexte suisse, bien que plutôt favorable en apparence, notamment sur le plan juridique, reste très fragile, et l’histoire nous a appris que ce sont dans les périodes de crise que les droits des minorités reculent.
Aujourd’hui, les organisations transphobes militantes montent en puissance en Suisse, à Genève. Nous refusons d’ignorer ce phénomène, nous refusons de tolérer ces idées ou de nous borner à une résistance passive.
Le 29 avril 2022 devait se tenir à Uni Bastions une conférence organisée par la Société suisse de psychanalyse.
Dans le public se trouvaient notamment des psychiatres actuellement en exercice, détenteur·trices de pouvoir sur leur patient·es. Ces personnes sont et seront en capacité effective de bloquer l’accès à la transition à des patient·es qui en ont un besoin vital, et y seraient d’autant plus enclin·es après une séance de bourrage de crâne à l’idéologie transphobe. Dans ce contexte, c’est pratiquement un enjeu de santé publique que de montrer une opposition à leur propagande.
C’est pourquoi nous, personnes trans et allié·es, avons décidé d’empêcher le déroulement de cet évènement. Nous sommes intervenu·es alors qu’il s’apprêtait à commencer et avons occupé l’espace par la lecture d’un discours et le chant de slogans contre la transphobie. Notre mobilisation fut un succès, car la salle s’est rapidement vidée dans une débandade comique, alors que la critical mass nous rejoignait pour nous accompagner dans la déclamation de slogans devant le bâtiment.
Nous n’avons pas cédé aux injonctions au débat. Il n’y a pas de débat possible avec des personnes qui ont pouvoir de vie et de mort sur nous. Le débat est un instrument des dominant·es pour canaliser la colère des dominé·es, et se prétendre sur un pied d’égalité avec des personnes qui possèdent un savoir situé.
L’accueil de cet évènement par l’université de Genève nous navre particulièrement. Cette institution, qui se targue de son inclusivité et de sa diversité, n’hésite pas à accueillir entre ses murs des représentant·es de l’idéologie mortifère qu’est la transphobie. Qu’un tel évènement puisse avoir lieu entre les murs de l’université est une insulte à tous·tes les étudiant·es, enseignant·es et membres du personnel intermédiaire touché.es par la transphobie.
Notre mot d’ordre : pas une seule plateforme pour la transphobie, ni pour aucune autre forme de discours réactionnaire. Nous ne débattons pas avec les transphobes, nous les combattons.