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Critical Mass : de la répression à l’agression policière

Le vendredi 26 mars, un voltigeur à moto a percuté un participant de la Critical Mass. Aux intimidations systématiques mises en place depuis le printemps 2020, s’ajoute maintenant la mise en danger des participant.e.x.s. Une nouvelle escalade dans la répression contre ce rassemblement spontané, par une police qui dit agir sans ordres, et dont les membres n’en font qu’à leur tête.

Genève |

Depuis plus de vingt ans, chaque dernier vendredi du mois, un défilé d’engins roulant de toutes sortes s’élance dans les rues de Genève. Par le fait, elle dénonce une ville qui donne toute la place aux bagnoles et aux flux incessants du pognon et des marchandises. Pendant quelques heures, elle fait une place à d’autres moyens de se déplacer, de partager et de vivre la rue.

Le vendredi 26 mars, une petite centaine de cyclistes s’est élancée depuis le Jardin anglais. Malgré une présence policière importante au point de rendez-vous et le contrôle d’une charrette sono pour casser l’ambiance, le défilé traverse joyeusement le pont du Mont-Blanc et continue sa route en direction de la Gare Cornavin. Une dizaine de policiers à motos suivent la Critical jusqu’à la Place des 22 Cantons. Après deux décennies sans parcours, les agents semblent encore s’agacer de voir le défilé tourner à gauche en direction de Plainpalais, alors qu’ils semblent désirer qu’il continue tout droit.

À la hauteur du Boulevard James-Fazy, les sirènes s’allument et quelques motos remontent plein gaz et au mépris de la sécurité des vélos, jusqu’à l’avant de la manifestation. Un instant plus tard, un voltigeur monte sur le trottoir et percute violemment la roue d’un participant. Le motard perd ensuite l’équilibre et lâche son véhicule qui tombe sur le côté.

Deux personnes sont très vite entourées par une dizaine d’agents. La première est contrôlée et relâchée, mais l’autre est interpellée et conduite au poste de Carl-Vogt pour finir avec vingt-quatre heures de garde à vue, une roue pliée et une plainte pour empêchement d’accomplir un acte officiel – ne pas s’être arrêté sur ordre de la police - à laquelle s’ajoute l’accusation de lésion corporelle simple contre le motard maladroit.

L’ordonnance pénale décrit ainsi les faits reprochés, ce qui étonnera probablement les témoins de la scène : « Être rentré en collision sur la moto d’un fonctionnaire de police, le Caporal XXX, ce qui l’a fait chuté à terre, lui causant de la sorte une blessure sur son mollet droit, des griffures sur la peau et douleurs à l’intérieur du mollet. » Lui aurait pu perdre une jambe sous la violence du choc, et un motard visiblement incapable de contrôler son véhicule se plaint au final des blessures occasionnées par l’agression dont il s’est rendu coupable.

Cette version des faits est encore plus risible lorsqu’on jette un œil à la photographie de la reconstitution des faits, réalisée par la division scientifique de l’Antirep de Genève. On voit visiblement l’empreinte de la roue de la moto dans les rayons de celle du vélo.

Une autre personne aurait ensuite été contrôlée, lorsque le défilé, resté pour soutenir la personne arrêtée, a repris sa route en direction de Plainpalais. Toute information à ce sujet peut être transmise à antirep-ge@riseup.net.

Chaque mois, depuis le printemps 2020, des dizaines de policiers sont déployés pour réprimer la Critical Mass. Pour la première fois depuis le tout début des années 2000. Et au milieu d’une crise sociale sans précédent, personne pour trouver à redire aux coûts occasionnés par ces interventions ? Parce que l’on sait qu’elles coûtent cher. Très cher. Fin mai, on apprenait que 579 heures de travail, dont 74 majorées, avaient été nécessaires pour empêcher son déroulement. Rien de mieux à faire, vraiment ?

« Le porte-parole assure qu’il n’y a pas de directives du département pour empêcher en tant que tel la tenue de la Critical Mass. » peut-on lire dans la presse. Dans la droite ligne des multiples amendes distribuées depuis un an, entre autres, pour des infractions mineures à la Loi sur la circulation routière, les autorités policières dénient le caractère de répression du droit de manifester que constituent leurs interventions. Dans cette dernière ordonnance pénale, tout comme dans les contraventions précédentes, nulle trace du caractère politique du défilé, ni d’une action coordonnée de la police pour l’empêcher. C’est presque comme si elle était là par hasard.

Mais plus inquiétant, cette dernière affaire laisse envisager que personne n’encadre l’action policière au niveau politique. Qui donc tient la bride de ces motards déchaînés qui foncent dans les cyclistes ? Qui au Conseil d’État dirige les forces de l’ordre ? La répression de la Critical Mass est une répression politique qui prend les atours d’une action technique, mais aurait pu ce mois de mars finir par un drame.

P.S.

Dans la perspective des suites potentielles de cette affaire, nous encourageons les personnes qui seraient prêtes à témoigner des événements à contacter l’antirep qui reviendra vers elleux en cas de besoin (antirep-ge@riseup.net)

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