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Notre arrivée sous le soleil
Le samedi 30 avril 2022, le mouvement 43m2 a installé l’hébergement d’urgence transitoire et autogéré sous le soleil, à Beaulieu, dans une ambiance solidaire et joyeuse. En une heure et demie, cent personnes ont réussi à monter un lieu d’accueil de jour et de nuit opérationnel. Il y a une cuisine équipée, un salon confortable, un coin pour enfants, des tentes, des lits, une installation électrique, une installation d’eau courante, des toilettes sèches, un wifi, du matériel informatique, de la nourriture, des sacs de couchage, plein de soutiens, bref tout ce qu’il faut pour l’ouverture d’un hébergement d’urgence transitoire. En une heure et demie, le mouvement 43m2 a commencé à mettre en place une réponse concrète au problème du manque de place dans les hébergements d’urgence, alors que l’État de Vaud doit encore réfléchir, ne serait-ce qu’aux modalités de l’évaluation qui pourrait, peut-être, un jour, aboutir à une prise de conscience pas si étonnante : “trop de personnes dorment dans la rue”.
Tout est construit et tout est mis en place : non seulement ce lieu d'accueil est opérationnel en termes matériels, mais il l'est également en termes humains. Un planning assure une présence sur place 24h/24h pour les 10 prochains jours.
Le vide
Néanmoins, ce soir, ce lieu d’accueil sera vide, alors que ce soir, 160 places dans les hébergements d’urgence sont supprimées. Actuellement, la seule présence humaine dans ce lieu d’accueil est une présence sécuritaire qui a pour ordre de garantir que ce soit bien vide et que les lits soient bien froids.
Ce lieu est vide comme tous les bâtiments sur lesquels des propriétaires spéculent, vide comme tous ces bâtiments de l’État de Vaud ou de la Ville de Lausanne qui attendent d’être détruits et vide comme les communiqués des autorités qui vantent aux médias une volonté de dialogue pendant qu’elles envoient, comme seule réponse, la police, la gendarmerie, ses fourgons et son dispositif armé.
L’arrivée de la police sous la pluie
Notre mouvement s’est formé suite à la lettre ouverte du 15 avril signée par une vingtaine d’associations et d’institutions oeuvrant dans le domaine de la précarité à Lausanne : il s’est notamment construit sur la base d’une convergence entre travailleur.euses sociaux.ales et collectifs militants. Beaucoup d’entre nous travaillent au sein de structures subventionnées par l’État ; nous pensions l’ouverture d’un dialogue avec la municipalité possible avant une quelconque mobilisation policière d’envergure. Nous nous attendions à ce que Mme Moeschler se rende sur place et se fasse une idée concrète de notre mobilisation et des revendications que nous portons au Conseil d’État et à Mme Ruiz. Dans un précédent communiqué, Mme Moeschler a exprimé la volonté de nous rencontrer en début de semaine prochaine afin d’entamer un dialogue et nous lui avons accordé le bénéfice du doute. Hier, nous l’avons appelée à de nombreuses reprises, mais elle n’a pas souhaité décrocher le téléphone. Sans discussion possible, la réponse de la municipalité s’est résumée à un ultimatum : soit vous partez, soit vous êtes toutes et tous arrêté.es.
À l’arrivée de la gendarmerie et de la police, on nous a annoncé une évacuation forcée dans les 15 minutes ultérieures. Malgré de nombreuses discussions, aucune négociation n’a été possible avec M. Hildbrand, tout a été immédiatement verrouillé. La police et la municipalité ont refusé à ce qu’un nombre de personnes très réduit puisse rester sur place pour sécuriser le matériel (sous l’orage) qui a nécessité d’importants moyens financiers et humains pour le récolter. À l’heure actuelle, nous n’avons toujours pas le droit de nous rendre sur place, ni de récupérer notre matériel, la police procéderait à des arrestations. Au moment de la sommation, la presse s’est vue refusée l’accès sur le lieu. En effet, l’évacuation forcée d’un hébergement d’urgence solidaire, c’est pas télévisuel, ça rend pas bien à l’image. La démonstration de force prime sur le dialogue, la menace sur l’écoute, les amendes, les sursis et les casiers judiciaires priment sur la solidarité.
Ouvrez notre lieu d’accueil
À la municipalité de Lausanne, nous demandons de pouvoir utiliser cet hébergement d’urgence transitoire et autogéré de Beaulieu pour accueillir les personnes qui sont de retour à la rue. Nous avons invité Mme Moeschler sur place, le lundi 2 mai entre 14h et 16h, afin de pouvoir discuter. OUVERTURE halles
Nos revendications
Nous formulons encore une fois nos revendications inchangées à Rébecca Ruiz et au Conseil d’État. Nous voulons :
- Le maintien du nombre de places à l’année.
- L’augmentation du nombre de places d’hébergement d’urgence.
- La dépénalisation du “camping sauvage” (utilisé pour criminaliser les personnes qui dorment dans la rue).
- Une refonte du Bureau des Réservations en collaboration avec les acteur.ices de terrain.
- La suppression des ordres de priorité officiels dans l’accès à une place d’hébergement d’urgence.
Rien n’a changé : la transformation de la Borde 47 ne répond absolument pas au problème du manque de place dans les hébergements d’urgence.
Certes, le lieu sera ouvert à l’année, mais il ne fera plus partie du dispositif d’hébergements d’urgence (studios dédiés aux personnes ayant un contrat de travail) et passera de 47 places à 21. Nous étions évidemment au courant de cette transformation et il s’agit d’une bonne nouvelle, mais ce n’est pas une réponse adéquate à nos revendications. Les personnes qui seront hébergées à la Borde sont des personnes qui, de par leur statut et leurs droits, sont censées avoir accès au marché habituel du logement. Néanmoins, étant donné la liberté dont dispose le secteur privé de l’immobilier, il est impossible pour beaucoup d’entre elles d’obtenir un contrat de bail. Des logements comme celui que propose la Ville au travers de la Borde sont absolument nécessaires et ont déjà été mis en place par des associations comme le Sleepin ou l’ALJF. Ces logements doivent s’additionner au dispositif des hébergements d’urgence, mais ils ne doivent, en aucun cas, les remplacer.
Nous sommes déterminé.es à investir nos énergies dans ce combat des plus légitimes. La Ville de Lausanne dépensera plus d’argent “du contribuable” en ordonnant ses interventions policières qu’elle n’en aurait dépensé en maintenant les hébergements d’urgence ouverts à l’année.
Salut, comment allez-vous ?
Je vous écris au sujet des familles L., M. et C. qui ont les enfants à l’école. Ils doivent quitter leur hébergement mardi matin et il n’y a pas de solutions ensuite. Ils n’ont pas pu avoir de réservations non plus. Je me demandais si vous aviez une place pour eux ?
Un des messages reçus le dimanche 1er mai. Envoyé par le projet “Droit à l’école, droit à un avenir”, commun à Opre Rrom, Sant’Egidio, Point d’Appui et Présence et Solidarités Lausanne
Le mouvement 43m2