Ce qui est appelé ici détransition désigne le processus qui stoppe (complètement ou temporairement) la transition. Néanmoins, l’utilisation du terme de “détransition” n’est pas neutre, il est en soi un jugement de valeur. Il désignerait un regret et un retour en arrière, qui a pour but de créer une peur de la transition auprès d’un public inaverti, un “retour à son sexe de naissance” qui serait rendu impossible par des actes médicaux. Pourtant, dans la majorité des cas, ce n’est pas la réalité.
Une instrumentalisation du sujet de la détransition
Certaines personnes concernéexs utilisent plutôt le terme de “retransition”, ne se retrouvant pas dans une idée de “retour en arrière” ou de “regret”, mais dans une poursuite de leur vécu de transition.
Le sujet de la détransition est malheureusement régulièrement instrumentalisé et présenté comme une menace, voire un risque ou un danger pour les jeunes, avec le seul but de rendre en réalité plus compliqué l’accès à la transition pour les personnes trans*. Sous couvert de “protection” d’une jeunesse présenté comme “vulnérable”, les personnes et associations anti-trans* proches de l’extrême droite s’évertuent à présenter comme une menace et rendre impossible la vie d’enfants, de personnes trans* et non-binaires aux conditions d’existence déjà souvent difficiles en raison des discriminations subies au quotidien.
Ces figures usent d’une stratégie sensationnaliste et polémiste pour se donner une visibilité et véhiculer leurs idées nauséabondes dans le débat public. Le bruit médiatique et les crispations que génèrent leurs discours ne permettent pas d’y voir clair, ni de répondre aux nombreuses questions et besoins des personnes elles-mêmes concernéexs.
Une montée des discours anti-trans* dans le débat public via des associations ou personnalités proches de l’extrême droite
Les nouvelles menaces pesant sur les droits des personnes trans* sont particulièrement visibles en Suisse comme ailleurs. Elles se matérialisent par des discours anti-trans* de plus en plus fréquents dans l’espace public, médiatique, politique et universitaire. Depuis quelques années, à Genève, on a pu constater la constitution d’associations proches de mouvements d’extrême droite catholique français ainsi que la montée de discours réactionnaires, dont le but est d’alimenter chez l’ensemble de la population une panique de l’“idéologie transgenre”. Les discours autour de la détransition se retrouvent chez de nombreuses personnalités, médias et associations dont les liens avec l’extrême droite sont avérés.
Par exemple, à Genève, l’AMQG (Association pour une approche mesurée des questionnements de genre chez les jeunes) s’est formée en lien fort avec l’UDC, parti d’extrême droite. Elle collabore étroitement avec des institutions réactionnaires qui se targuent de protéger des enfants qui seraient “contaminés par l’idéologie transgenre”. On peut notamment citer l’Observatoire de la Petite Sirène, un mouvement proche de l’extrême droite catholique française ; l’association Familles et Liberté, qui affiche fièrement des positions contre les transidentités, l’avortement et le mariage pour touxtes ; et l’association Juristes pour l’Enfance, qui s’attaque légalement à l’accompagnement des enfants trans*. On retrouve ces même rhétoriques anti-trans* chez des figures de proue médiatisées comme Marguerite Stern et Dora Moutot, pour qui les transidentités attaqueraient les luttes féministes et feraient ainsi reculer les droits des femmes. Elles instrumentalisent des discours féministes à des fins transphobes et reçoivent ainsi une attention particulière des pouvoirs politiques, comme lorsqu’elles ont été accueillies à bras ouverts par la présidente de l’Assemblée nationale issue de la majorité au pouvoir en France, Aurore Bergé. Elles n’hésitent pas non plus à donner des interviews à Valeurs Actuelles ou à collaborer avec d’autres personnalités d’extrême droite, connus pour leur antiféminisme.
Sous prétexte de défendre les enfants et les jeunes adultes d’un pseudo “lobby LGBT”, leur objectif est en réalité de mener des campagnes pour faire reculer les droits des personnes trans*, en leur refusant notamment l’accès aux soins. Ces associations, personnalités et médias ont pour objectif de faire monter une “panique morale”. Comment est-il possible qu’en 2023, la Radio Télévision Suisse puisse alimenter des discours anti-trans* d’extrême droite dans le débat public ?
RTS complice !
Il est temps de dénoncer l'instrumentalisation de la détransition par des discours réactionnaires et la diffusion à l'échelle nationale de leurs idées nauséabondes à la télévision. En produisant et diffusant une émission sur la détransition, la RTS se rend complice de ces discours dangereux.
Nous voulons des médias audio-visuels et un travail journalistique de qualité, qui ne participent ni à la désinformation autour des parcours et vécus des personnes trans* et non-binaires, ni à la diffusion d’idées réactionnaires. Ce “débat” n’en est pas un, mais divise la lutte pour les droits des femmes et des personnes trans*.
Pour cela noux, personnes trans* et non-binaires, demandons à la Radio Télévision Suisse (RTS) et notamment à l’émission Temps Présent de :
- Ne pas diffuser l’émission “Détransition, ils ont changé de sexe et ils regrettent” le jeudi 2 mars 2023
- Retirer l’émission des plateformes de diffusions en ligne
et :
- Des médias qui dépeignent avec justesse et par une approche trans-affirmative des vécus trans* et non-binaires en respect de l’intégrité des personnes filméexs et interviewéexs
Soyons nombreuxses dans la rue jeudi 2 mars 2023 à 18h30 !
Ramène tes pancartes et plus beaux slogans !