Le 8 mars, on était nombreuxses à se rassembler à Genève pour la manif de la journée internationale des luttes féministes. Le mot d’ordre de la manif, c’était de faire exister dans la rue une riposte féministe contre la montée du fascisme des gouvernements et des forces autoritaires qui renforcent les inégalités, attaquent les droits des femmes, leurs libertés et leur corps tout en propageant l’homophobie et la transphobie [1].
Alors qu’ils n’ont clairement rien à faire dans nos luttes féministes, des groupes de femmes d’extrême droite, dont des anti-trans et des racistes, se sont incrustés à la manif pour tenter de surfer sur la "défense des droits des femmes" et répandre leur idéologie nauséabonde.
Pour répondre à ça, on tient à réaffirmer que notre féminisme est résolument antiraciste, transinclusif et antifasciste !
1. Les transphobes
Un petit groupe de TERFs a été repéré dans la manif avant le départ avec des pancartes et des slogans tels que "les lesbiennes n’aiment pas les pénis", ou "sex-based rights now". Ces slogans sont essentialisants car ils mettent l’accent sur le sexe assigné à la naissance. Ce faisant, ces slogans discréditent les femmes trans (en refusant de les considérer comme des femmes) et les excluent des luttes féministes [2].
Pour rappel, "TERFs", ça veut dire "Trans Exclusive Radical Feminists". Cet acronyme est en fait utilisé pour désigner les personnes qui instrumentalisent une rhétorique féministe pour faire du militantisme anti-trans. Elles prétendent défendre les "vraies femmes", qui seraient celles qui ont une vulve en s’appuyant sur des discours biologisants qui nient le caractère social du genre. Dans leur discours, les personnes trans sont tantôt présentées comme malades, et tantôt comme des ennemis infiltrés dans les espaces féministes. Elles militent entre autres pour réduire l’accès aux soins pour les personnes trans, en particulier les enfants trans. Leurs luttes sont basées sur la marginalisation de groupes déjà largement opprimés. De plus, leur idéologie transphobe est aussi une attaque contre toutes les femmes et toutes les personnes souffrant de discriminations à cause du genre. Refuser le principe d’auto-détermination de chacunex sur son propre corps, c’est rouler sur des années et des années de luttes féministes qui justement tentent de s’éloigner des théories essentialisantes.
Pour plus d’info sur les transphobes qui fricotent avec l’extrême droite voir :
- la vidéo “Comment la droite réactionnaire construit une”question trans" ? du collectif Toutes Des Femmes, sur le média trans XY Media
- l’émission la pire “luttes trans” sur la situation en Suisse romande, notamment l’interview sur les combats contre les transphobes à Genève à 36’58’’
Avant le départ, une prise de parole au micro a brièvement rappelé les valeurs de la marche en affirmant que les TERFs n’étaient pas bienvenues et qu’elles étaient invitées à partir. Des camarades leur ont confisqué leurs pancartes. Des groupes de gens leur ont crié de partir, à coup de slogans comme "Les TERFS dehors", "Pas de quartier pour les fachos" ou "Solidarité avec les trans du monde entier". Elles n’ont pas voulu partir et ont crié des insultes en faisant des signes de vulves avec les doigts (mdr).
La manif a quand même démarré, ce qu’on trouve dommage, parce qu’on aurait trouvé important de les faire dégager avant de démarrer. Plus concrètement, on pense qu’il aurait été nécessaire de prendre le micro pour expliquer à tout le monde ce qu’il se passait, rappeler ce qu’est le militantisme anti-trans, et réaffirmer qu’on ne marcherait pas à leur côté et qu’on ne bougerait pas tant qu’elles ne dégageraient pas. On pense notamment à ce qui s’est passé à la manif du 8 mars à Paris, où les personnes présentes ont refusé de marcher aux côtés d’un groupe d’extrême droite et l’ont fait savoir de manière unie. A ce sujet, voir ce mini-reportage de la chaîne Le Média.
On sait que dans ces manifs, plein de personnes présentes ne sont pas très familières avec les thématiques trans et pourquoi elles représentent un enjeu féministe essentiel. Ça aurait donc été un bon moment pour sensibiliser les personnes moins au courant tout en leur expliquant qu’il est exclu que nous manifestions au côté de TERFs. Ça aurait permis à touxtes de comprendre ce qui se passait, pour agir collectivement. Il est plus que nécessaire d’être uniexs dans ces cas-là pour que ce soit pas aux personnes les plus impactées par la violence de ces fafs d’être obligéxs d’aller se confronter à elles. En d’autres mots, ça devrait pas être aux personnes trans de devoir aller faire dégager les transphobes (et ce d’autant plus parce qu’elles sont particulièrement virulentes face aux personnes trans, comme cela a été le cas pendant la marche).
Les TERFs présentes sont restées dans la manif, de la Poste du Mont-Blanc jusqu’au quai des Bergues, où certainexs camarades ont de nouveau crié des slogans pour leur dire de partir. Un cordon de flics s’est mis entre les TERFs et la foule, et des organisatrices de la manif sont venues demander nous demander de poursuivre la manif et d’arrêter d’accorder de l’attention aux TERFs.
Dénoncer leur présence n’est pas suffisant, il est plus que nécessaire de nous coordoner pour les faire sortir de nos marches et de nos quartiers. Refusons de commencer ou continuer la manif si des fachos y sont. Arrêtons la manif jusqu’à ce qu’iels se cassent, chantons ensemble des slogans et usons de toutes les techniques nécessaires pour les faire partir.
2. Un collectif de femmes d’extrême droite
Le jour de la manif, des membres d’un collectif d’extrême droite ont accroché deux banderoles sur l’île Rousseau et la plateforme du pont de la Machine avec des slogans racistes : "Les Européennes ne sont pas des frontières violables" et "Libérez-nous de l’immigration".
Ce groupe se revendique activement comme « féministe identitaire » et s’illustre par de nombreuses actions xénophobes, racistes, islamophobes et anti-immigration. C’est dans leurs habitudes d’aller à des manifestations en essayant d’y être visibles avec leurs banderoles et leurs slogans islamophobes.
Pour pouvoir faire passer leurs discours comme "féministes", ce groupe se saisit d’une des thématiques centrales des mouvements féministes : la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Elles ne s’intéressent pas aux faits de violences, mais à des mythes racistes ; pour elles, les hommes qui commettent des agressions sont les hommes racisés, migrants ou musulmans. Donc, pour lutter contre les violences faites aux femmes, il faudrait lutter contre l’immigration et ce qu’elles appellent « l’islamisation » de la société. Ce n’est pas étonnant quand on sait que leur branche suisse est directement issue du groupe féminin du groupuscule néonazi Militants Suisse. Leurs discours fémonationalistes [3] n’auront jamais leur place dans nos luttes féministes.
3. Les autres minables
A ces deux groupes s’est aussi ajoutée la présence de masculinistes (qui ont suivi une camarade et sont allés compter fleurette à la police), ou encore d’un candidat politique propageant ses idées réactionnaires en distribuant des tracts appelant à "interdire l’écriture inclusive", "stopper les changements de noms de rues" (qui féminisent la ville), interdire "le burkini dans les piscines" et "protéger les enfants et la jeunesse contre l’apologie du wokisme, LGBTQ+ et la notion de genre dans les lieux publics".
On est plus fortexs !
Même si on est dégoûtéexs par la présence de ces raclures à notre marche, on oublie pas qu’on était mille fois plus nombreuxses qu’eux et que leurs maigres interventions sont loin d’avoir gâché la manif. Les féministes ont par centaines répondu présentexs en force à l’appel et les discours étaient puissants et percutents ! On pense notamment au discours d’Afroswiss qui résonnait tout particulièrement à la veille du début des journées d’action contre le racisme et les violences policières, au discours conjoint de Marad (collectif juif décolonial) et des Foulards Violets (collectif de femmes musulmanes) qui ont montré à quoi ressemble la convergence des luttes, et au discours du CRAQ (collectif radical d’action queer) qui a rappelé l’importance des réseaux de solidarité entre personnes trans mais également avec tous les mouvements de libération :
“En tant que personnes trans nous ne pouvons arreter notre combat au seul marqueur de sexe sur notre carte d’identité. Nous devons porter le combat d’un monde sans frontières, demander des papiers pour touxtes ou plus de papiers du tout.”
La rue est à nous, et on l’a rappelé en mettant aujourd’hui nos propres banderoles à l’île Rousseau et au pont de la Machine :

PAS D’EXTRÊME DROITE DANS NOS MARCHES, PAS DE FÉMINISMES SANS LUTTES TRANS !

FÉMINISTES CONTRE FRONTIÈRES, MIGRANTS WELCOME !
Préparons-nous aux prochaines manifestations féministes ! Et on se retrouve dès le 22 mars pour le Carnaval antifasciste à Lausanne, pour agir ensemble et faire dégager l’extrême droite de nos vies !
En ce 8 mars, on réaffirme l’importance de s’unir et s’organiser, ici et partout dans le monde, contre l’extrême-droite, le capitalisme, l’impérialisme et contre tous ceux qui le maintiennent ! Plus que jamais, on reste antifascistes et antiracistes ! On laisse pas passer la transphobie et on continue à se battre pour améliorer nos conditions de vie à touxtes !
PAS DE FASCISTES DANS NOS MANIFS, PAS DE MANIFS POUR LES FASCISTES