Répression - Enfermement

Se divertir contre - Violences d’Etat, répressions et enfermement (I)

En ces temps de déconfinement progressif et incertain, on est sommé.es de faire notre possible pour permettre un retour à la “normale”, qu’il s’agisse de recommencer à consommer comme avant, ou de retourner au charbon, dans tous les cas de redevenir un rouage efficace et serviable de la société industrielle. Et le divertissement (qui n’est pas gratuit) nous est aussi proposé comme solution pour encaisser l’absurde de cette situation. Mais si, au lieu de nous divertir pour décompenser, on se divertissait pour s’armer ? Episode II sur les violences d’Etat.


Les violences d’État hors contexte de guerre sont multiples. Elles s’abattent sur celles et ceux que le pouvoir, c’est-à-dire les classes dirigeantes, veulent voir parquées, soumises, asservies, ou mortes, que ce soit à cause de ce que l’on est (non-blanc.hes, pauvres, jeunes,…) ou de ce que l’on choisit de faire (militant.es, dissidents politiques, mouvements indépendantistes..). Elles ont dans tous les cas la Loi de leur côté et s’imposent par leurs différents agents et autorités, qu’il s’agisse de la police, des gardien.nes de prisons, des responsables de centre de rétention et de redressement, par les psychiatres et les médecins, par les juges et les avocats, et toute autre personne qui contribuent à ces violences par ses actes ou par son silence complice.

Dans ce monde rendu profondément chaotique, inégalitaire et instable par les forces destructrices d’un capitalisme industriel dévastateur au service d’États autoritaires, les exemples de ces violences sont innombrables. Leur régularité est la démonstration de leurs natures systémiques, c’est-à-dire du fait qu’elles ne sont pas une "erreur", une "bavure" ou un "dommage collatéral", comme les gouvernements et classes possédantes essaient de nous faire croire, mais bien une composante inhérente au monde tel qu’elles le défend. Quoiqu’en dise l’ignoble et immonde préfet de la police de Paris, Lallement [1].

Après les scandales industriels [2], une deuxième série pour se divertir contre les violences d’État, où l’on aborde les multiples raisons et manières dont l’État opprime, réprime, dresse et tue - directement ou non - les indésirables. Qu’il s’agisse de personnes précaires et marginalisées, d’adolescents refusant l’autorité des adultes et de l’État, de personnes non-blanches subissant les violences de nos États colonialistes et racistes, de militant.es politiques engagé.es ou de dissident.es politiques luttant et/ou prenant les armes pour leur indépendance. Une liste de films accessibles, malgré la violence de leurs contenus, qui s’ancre forcément dans un certain cinéma, majoritairement européen et nord-américain, mais pas que.

Pour regarder ces films gratuitement, il y a plusieurs possibilités (mais protégez-vous avec un VPN si possible, gratuit avec riseup ou calyx)

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Se divertir contre - Violences d’Etat, répressions et enfermement (I)

Sur ma peau (2018)

Stefano Cucchi, petit dealer et ancien toxicomane, fait partie de ces personnes cabossées par la vie, entre précarités multiples et complications familiales. Il porte le poids de son casier judiciaire et tente comme il peut de s’en sortir face à une justice qui ne le lâche pas. Un soir, contrôlé par des carabinieri, il finit en garde à vue pour quelques grammes de produits illégaux. Mais, alors que Stefano tente d’éviter les problèmes avant de comparaître face à la justice, les flics l’emmènent dans un bureau isolé pour se défouler. Ne pouvant ensuite en parler face à un juge qui doit statuer sur son cas, il se retrouve pris dans un engrenage où le silence forcé s’impose au corps meurtri et enfermé. Un film tiré d’une histoire vraie, où les coups ne sont pas visibles, où la violence n’est pas action, où le drame des violences policières se vit, en silence, fatalement, à même la peau. Un film sur les rouages d’une justice contre laquelle la famille de Stefano va se battre pour comprendre ce qu’il est arrivé à leur fils et frère.

Punishment Park (1971)

Dans les années 70, alors qu’ils sont en guerre en Indochine, les États-Unis font passer une loi destinée à maintenir l’ordre sur leur propre territoire : toute personne susceptible d’être un danger pour la sécurité intérieure (activité militante, immoralité, pacifisme…) peut être arrêtée, jugée et punie arbitrairement. Mais une alternative aux années de prison leur est offerte, Punishment Park. Illes ont trois jours pour marcher à travers le désert et rejoindre un drapeau national planté 80 km plus loin, tout en échappant aux flics armés lancés à leurs trousses. Une puissante satire antimilitariste basée sur les lois d’exception votée par l’État à la même époque (McCarran Act) - lois d’urgence qui, comme partout, ont tendance à rentrer dans le droit commun ensuite. Tourné comme un documentaire journalistique, le film alterne les phases de poursuites, les “procès” politiques et les apartés, pour un résultat prenant, interpelant et marquant. À noter, ce film de Peter Watkins n’ a été diffusé que 4 jours dans un petit cinéma de Manhattan avant d’être banni de l’ensemble du territoire national [3].

Detroit (2017)

À la fin des années 60, les États-Unis, toujours adeptes de la ségrégation raciale, sont en ébullition suite à d’innombrables violences policières racistes et connaissent une vague de révoltes urbaines inédites. À Detroit, les flics sillonnent les rues armés de fusils à pompes, et la garde nationale est dans la place. Un soir, des coups de feu se font entendre dans un Motel situé en marge des émeutes. La police se rend sur place et encercle le bâtiment. Persuadés d’avoir affaire à un “tireur isolé”, les policiers de Détroit investissent en toute illégalité le Motel et séquestre la poignée de client qui se trouvait là, des hommes Noirs - et plusieurs femmes Blanches, jamais soupçonnées d’être coupables. S’en suit des séances d’interrogatoires et de tortures psychologiques par des flics sûrs de leur impunité et du soutien d’un État raciste. Ils seront prêts à tout pour trouver, non pas le coupable, mais un coupable. La réalisatrice nous sert une intense adaptation d’une histoire vraie, l’Affaire du Motel Algiers pendant les émeutes raciales de Détroit. Une histoire qui n’appartient pas au passé, mais agit bien au présent tant la dimension raciste des violences et meurtres policiers est indéniable. On en a pour preuve, parmi d’innombrables autres, le récent meurtre de George Floyd, un homme noir de 46 ans tué par la police à Minneapolis le 25 mai 2020. Un assassinat de plus qui a rallumé l’incendie, la révolte gronde, la violence des dominé.es s’exprime et fait trembler le pouvoir.

Compañeros / La Noche de 12 años (2018)

Nous sommes en Uruguay dans les années 70. L’État devient une dictature militaire suite à un putsch et l’on suit José, Mauricio et Eleuterio, dissidents faits prisonniers politiques, puis otages n’existant plus pour le monde extérieur. Pour les détruire mentalement et physiquement, ils subissent des tortures nombreuses et variées, privations et répressions aléatoires, tout en changeant régulièrement de lieux d’enfermement. Au-delà de la survie physique de corps que l’État soumet, la lutte devient rapidement mentale : comment ne pas devenir fou et perdre la raison, comment ne pas vouloir mourir pendant cette longue nuit qui dura 12 ans ? Un film sur les années sombres d’une dictature militaire sanglante, une immersion sensorielle aux côtés de ces prisonniers qui ont réellement existé, où les sons et les images nous plongent dans leur interminable combat pour ne pas perdre leur humanité.

Fruitival Station (2014)

Nous sommes en 2009. Oscar Grant a 22 ans et vit à San Francisco. Comme pour tant d’autres personnes, le soir du Nouvel An est l’occasion de sortir avec ses ami.es, de faire la fête et de penser à autre chose le temps d’une soirée. Mais Oscar est afro-américain, et quand la police intervient pour une altercation dans le métro qui les ramène à la maison, ce sont des Noirs qui sont arrêtés, frappés et maintenus sur le quai. La tension monte lorsque les flics passent des insultes racistes aux menottes. Alors qu’Oscar est plaqué au sol sur le ventre pour être emmené, un des flics sort son arme et tire... Un “fait divers” comme il en arrive toutes les semaines aux États-Unis, tous les mois en France, moins fréquemment en Suisse [4]. Le résultat d’un racisme systémique au service du bras armé de l’État. Ce ne sont pas des bavures [5].

Hunger (2008)

En 1981, en Irlande du Nord, cela fait déjà des années que des militants de l’Armée Républicaine Irlandaise (IRA) et l’Armée de Libération Nationale Irlandaise (INLA), emprisonnés à la prison de Maze, luttent à l’interne pour que soit reconnu leur statut de prisonnier politique par le Gouvernement britannique. Mais, dans une Irlande bouillonnante d’une lutte armée indépendantiste, l’enjeu est trop important et la prison les invisibilise, eux et la légitimité de leur combat, en les qualifiant de prisonniers de droit commun, autrement dit des criminels. Le rapport de force se durcit quand Bobby Sands décide, avec d’autres prisonniers, d’entamer une grève de la faim, déterminé à aller jusqu’au bout pour que vive un jour une Irlande républicaine et socialiste. Un film glaçant, sensoriel, frontal, sur un milieu carcéral où les corps sont des champs de bataille politique permanents. Un film sur une lutte contre l’autorité coloniale britannique où la répression de l’État s’abat jusque dans la capacité même du corps meurtri à exister.

Cold Water (2014)

Brad, adolescent s’occupant entre atelier de mécanique et petits deals, se fait envoyer de force par sa mère à Coldwater, un centre de redressement pour mineurs “à problème”. Un camp, isolé et retranché, tenu par un ancien militaire se faisant pour mission de former de bons citoyens à coups de discipline, d’autorité et d’efforts physiques. Pris au piège d’un univers carcéral où la non-soumission se paie cher, où les violences physiques et psychologiques sont monnaie courante, Brad va devoir trouver comment survivre sans se laisser broyer mentalement et physiquement. Mais on ne joue pas impunément contre l’autorité, et l’engrenage peut être infernal. Un film qui dénonce l’opacité du juteux marché privé des “Boot Camp” pour mineurs aux États-Unis, l’absence de législation qui laisse libre cours aux abus d’autorité, aux humiliations et violences subies par des mineurs qu’on prétend redresser de force. Un récit sombre et violent sur une société qui ne voit pas d’autres solutions que la main de fer pour mater une jeunesse qu’elle a engendrée et qu’elle ne comprend pas quand celle-ci lui reproche son monde de merde.

Diaz (2012)

Gênes, Italie, en 2001. Les puissances mondiales se réunissent à l’occasion d’un Sommet du G8. Depuis plusieurs jours des manifestations bloquent le centre-ville. Entre destruction du mobilier urbain et confrontation, les flics, forcés à la “retenue”, sont à cran et attendent qu’on leur lâche la bride. Nous sommes au dernier jour du Sommet et l’école Diaz sert de dortoir pour qui en a besoin (organisateur.ices, militant.es, journalistes, étudiant.es, soutiens...). Bien décidés à enfin réprimer les manifestant.es, et prétextant que des “blacks blocs” se cacheraient dans l’école, l’État envoie plusieurs centaines de robocops envahir le bâtiment et se défouler, à l’aveugle, avec ce qui leur passe sous la main et par la tête. Mais la répression ne s’arrête pas là dès lors qu’il s’agit de mater et de terroriser les dissident.es. Une adaptation intense et éprouvante d’un crime d’État historique, mettant autant en cause la Police (humiliations, violences psychologiques, physiques, tortures, faux témoignages, faslfications de preuves…) que la Justice qui lui fourni l’impunité de sa brutalité. Un Sommet où les flics ont assassiné par balles l’étudiant Carlo Giuliani, un meurtre sans coupable selon la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

Colonia (2015)

Daniel, photographe allemand, participe au mouvement de soutien au candidat Allende au Chili. Lena, son amie hôtesse de l’air, le rejoint pour de brèves retrouvailles. Nous sommes en 1973, au moment où Pinochet fait un coup d’État et prend le pouvoir. Mais le film ne parle pas de ça. Daniel se fait rapidement arrêter et envoyer dans un centre de torture pour dissident politique, la Colonia Dignidad. De son côté, Lena découvre qu’il s’agit en réalité d’une secte et décide de la rejoindre pour tenter de sauver son ami. Un film dans lequel, si on passe outre l’habituelle romance dramatisée servant de fil rouge, on se sent rapidement à l’étroit, enfermé.e. Une histoire vraie sur une colonie agricole fondée en 1961 par Paul Schäfer, un ancien nazi devenu un gourou pédophile et violent qui manipulait, contrôlait et violentait à sa guise. Il a eu les pleins pouvoirs sur sa secte et ses membres, tout en servant de centre de torture à la dictature de Pinochet jusqu’en 1991, soit pendant près de quarante ans en toute impunité [6]

In The Name Of The Father (1994)

Nous sommes en Irlande du Nord, en 1975. L’armée britannique occupe Belfast et fait face à une population hostile, et à l’IRA, mouvement indépendantiste armé posant des bombes sur le sol anglais. Gerry Conlon vit de galère et de petits vols, ce qui ne plaît à aucun des camps vu les problèmes qu’il crée. Il part pour Londres, histoire de changer d’air, mais se retrouve au mauvais endroit et au mauvais moment, arrêté par la police antiterroriste comme suspect numéro 1 des derniers attentats à la bombe. Doté de lois antiterroristes d’exception, bien décidé à ne pas laisser s’échapper l’Irlande de son emprise, et sous pression de députés et d’une population britannique terrorisée par les attentats, l’État anglais est prêt à tout pour trouver un coupable à condamner, lourdement. Tirée de l’affaire des “Quatre de Guilford”, cette histoire nous emmène dans l’engrenage répressif d’un État se donnant tous les droits pour écraser tout ce qui contredit son autorité, à tort ou à raison. Bien qu’un peu longuet et très porté sur la vie de son personnage principal, on traverse, par son biais, trente ans de conflits, de l’occupation de Belfast par les blindés aux campagnes de luttes contre la Justice anglaise, en passant par les attentats à la bombe et l’univers carcéral des prisonniers politiques. Un récit sur les violences impérialistes pas si vieilles et pas si lointaines.

Scum (1979)

En Angleterre, dans les années 70, trois nouveaux pensionnaires intègrent une maison de correction pour mineurs. Encadrés par ce qu’on fait de mieux en termes d’autorité paternaliste et réactionnaire, ils vont connaître l’humiliation, les violences psychologiques et physiques, le cachot et surtout l’arbitraire d’un enfermement qui n’a d’autre but que de les soumettre. Mais le danger vient aussi des autres mineurs pris au piège d’un enfer sans date de libération. Un enfer où chacun tente de survivre comme il peut, fait subir aux plus faibles la violence infligée par les plus forts et où la sortie de scène ne peut être parfois que dramatique. Un récit violent sans héros ni manichéisme, brut et cru, sur ce que la société considère comme des rebuts (“scum”) à broyer par la force. D’abord réalisée sous forme de téléfilm, l’oeuvre a tellement choqué la BBC qu’elle n’a pas été diffusée et qu’Alan Clarke a dû en faire un film pour qu’il sorte publiquement.

The Stanford Prison Experiment (2016)

En 1971, dans la prestigieuse université de Stanford, une équipe de psychologues met en place une expérience destinée à mieux comprendre l’impact de l’enfermement sur les prisonniers et les gardiens de prison. Dans des locaux universitaires aménagés en prison, des étudiants volontaires sont répartis aléatoirement entre détenus et matons, les règles sont énoncées et l’expérience peut commencer sous l’oeil attentif des caméras et des psychologues qui l’encadrent. Mais la puissance de l’uniforme et le goût du pouvoir mènent certains étudiants à prendre leur rôle très à coeur, entraînant les autres dans un jeu où l’expérience devient réalités vécues, les règles deviennent une oppression concrète, et leur non-respect mène à des punitions de plus en plus dures. De leur côté, les psychologues, fascinés par ce qu’ils ont mis en place, se prennent suffisamment au jeu pour ne plus savoir quand les limites sont franchies. Une adaptation cinématographique d’une expérience du même nom qui est bien plus réputée en tant que référence que les supercheries (intellectuelles, scientifiques, politiques...) qui la fondent [7]. On retient cependant une observation importante : les comportements autoritaires et violents ne dépendent pas principalement de la personnalité des individus mais bien de leur mise en situation. Autrement dit, nous sommes tou.tes sujet.tes à avoir des comportements dominants et sadiques dès lors que l’on se soumet à une autorité (scientifique, hiérarchique, étatique,.) et qu’on intériorise le rôle qu’elle nous donne.

Z (1969)

Dans un pays inconnu (la Grèce), à une époque non nommée (la Guerre Froide), l’État et ses polices rentrent dans la lutte contre le “communisme” (toute forme de dissidence). Le parti d’opposition, antimilitariste et socialiste, organise avec difficulté une grande réunion où son représentant doit faire un discours dans le cadre de la campagne électorale. Mais une contre-manifestation attaque violemment plusieurs figures du mouvement et, face à la passivité de la police, ceux-ci finissent à l’hôpital dans un état grave. Tandis que la tête de l’État défend la thèse de l’accident, un juge d’instruction intègre voit rapidement apparaître l’impression d’un assassinat organisé par les hauts gradés de la police, en lien avec la Gendarmerie et un groupe d’extrême-droite. Mais on n’accuse pas impunément l’État. Une adaptation assumée d’un roman portant sur l’histoire de l’assassinat du député grec Grigoris Lambràkis en 1963 et le scandale qui suivit. Une histoire qui fit trembler l’État, notamment en provoquant la montée de partis du centre ou de gauche, et qui mena à la dictature des Colonels. Un film prenant et important, tourné en Algérie pour cause de dictature en Grèce, avec une musique piochée dans le répertoire déjà existant de Mikis Théodoràkis, celui-ci, enfermé dans les prisons de la même dictature, ne pouvant pas réaliser la bande originale.

Rubrique des dystopies

La Servante Ecarlate(1990)

Une partie du monde est en guerre, l’air est pollué par des poisons chimiques et des radiations, la pluie comme les cours d’eau sont devenus toxiques, et une majorité des femmes, empoisonnées, est devenue stérile. Les anciens États-Unis sont dirigés par un gouvernement fasciste et intégriste religieux qui a pris le contrôle du corps des femmes pour maintenir à tout prix la natalité de sa société élitiste et militaire. Kate, qui voulait s’enfuir avec sa famille, est arrếtée et se retrouve dans la caste des servantes : les reproductrices des classes supérieures. Asservie dans son nouveau rôle, elle nous emmène dans les méandres de cette société totalitaire où, si elle n’enfante pas d’une manière ou d’une autre, elle risque de finir dans une colonie, condamnée à la manutention des produits radioactifs. Première adaptation du fameux roman de Magaret Atwood (1985), une claque dystopique aux nombreux liens historiques, que ce soit sur l’instauration d’un régime totalitaire et d’une société de castes, ou par les innombrables manières dont, de tout temps, les autorités religieuses, étatiques et patriarcales, ont tenté de contrôler, de gérer, culpabiliser et soumettre le corps des femmes considéré comme ressource de leur pouvoir [8]

V pour Vendetta (2006)

À Londres, en 2038, un gouvernement fasciste s’est imposé en profitant de la peur et de la terreur engendrées par plusieurs attentats aux armes chimiques. Cette dictature autoritaire menée par le Haut Chancelier applique une politique de persécution et de suppression de toutes les personnes déviantes (des “païen.nes” aux musulman.es, des marginaux.ales aux dissident.es politiques). La Liberté est supprimée au profit de la Sécurité. Mais un homme défie l’ordre établi, affublé du masque de Guy Fawkes, en faisant exploser des lieux symboliques du Pouvoir. Une manière d’aller contre l’impuissance et la fatalité d’un pouvoir intouchable, et de permettre à ses idéaux d’émancipations et de liberté d’exister, d’inspirer et de lui survivre. Une adaptation partielle (et une fin modifiée.) de la magnifique BD d’Alan Moore qui, bien que reprenant son univers et certaines de ses idées, reste une version édulcorée, modérée, simpliste et en partie neutralisée d’une histoire originale bien plus riche, stimulante et engageante, qui parlait d’écologie, d’antifascisme et d’anarchisme, dans une dénonciation radicale du terrorisme d’État [9].

Rubrique “Ca existe, mais vous n’êtes pas obligé.es”

Bataille à Seattle (2008)

En 1999, à Seattle, a lieu le premier Sommet de l’OMC sur sol états-unien, une rencontre entre Puissances pour approfondir et élargir le néolibéralisme à l’ensemble de la planète. Mais les manifestant.es sont bien plus nombreux.ses que prévu.es, et les modes d’action suffisamment divers pour créer un bordel poussant à l’arrêt prématuré du Sommet. Un film sous forme de destins croisés lors de ces évènements historiques, inédits autant par l’ampleur des manifestations que par la répression policière qui s’abat de manière aveugle et aléatoire. Mais, à nouveau, un héros et leader charismatique en tête de lutte, une romance inutile de ce même beau gosse avec une autre beauté, tout en étant meneur d’une manifestation qu’il souhaite avant tout “pacifiste”. D’ailleurs, l’autre aspect inédit de ces manifestations est un des grands absents du film, les groupes organisés dans l’action directe offensive et leur rôle dans l’annulation du Sommet [10]. Un film plein de stars et plein de pathos individuels qui éclipsent l’ensemble et tournent parfois à l’absurde. Des clichés de toutes parts qui nous renvoient toujours plus à la nécessité de se donner les moyens de questionner la notion de violence [11]. Reste des infos basiques et partielles, des images d’archives intéressantes, et un film “grand public” pouvant peut-être contribuer à sensibiliser certains publics, s’il n’est pas jugé trop partisan d’un côté, et trop mauvais de l’autre.

P.S.

Image de couverture : photos du fournisseur de matériel anti-émeute, policier et militaire Bulldog Tactical Equipment (USA).

Notes

[1« Il n’y a pas de race dans la police » : le message de Didier Lallement à ses troupes, https://www.mediapart.fr/journal/france/020620/il-n-y-pas-de-race-dans-la-police-le-message-de-didier-lallement-ses-troupes

[4Depuis les années 2000, Joseph Nduaku Chiakwa, Sébastien-Umüt Kiran, Hervé Mandundu, Lamin Fatty, Mike du collectif Jean Dutoit, et les nombreux anonymes

[5“En 2013, au moins onze personnes ont été tuées au cours d’une opération policière. Le constat est le même qu’en 1983 : dans la très grande majorité des cas, les victimes sont des héritiers de l’immigration. Ni dérapages fortuits ni bavures, ces meurtres sont l’aboutissement d’une violence quotidienne exercée au nom du maintien de l’ordre. Face à cet état de fait, certains s’organisent pour le faire reconnaître et enrayer la machine. État des lieux depuis les Minguettes et ses alentours”, https://www.zite.fr/ceci-nest-pas-une-bavure-2/

[7Thibault Le Texier, Histoire d’un mensonge : enquête sur l’expérience de Stantford,

[8Voir par exemple "Fragiles ou contagieuses : le pouvoir médical et le corps des femmes, https://www.cambourakis.com/tout/sorcieres/fragiles-ou-contagieuses/

[11Voir le dossier de la revue “Moins” n°43 “La violence en question”, dont certains articles sont sur Renverse : https://renverse.co/infos-locales/Moins-no43-La-violence-en-question-2271

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