En l’espace de deux semaines ce printemps, deux conférences transphobes ont été empêchées par des militant.e.x.s. Les deux interventions qui étaient censées se tenir dans les murs de l’université avaient un certain nombre de points communs dont un des plus importants est leur proximité théorique avec des mouvements d’extrême droite (parfois même d’ultradroite). L’université offrait à ces intervenant.e.x.s des plateformes rêvées pour diffuser leurs idées nauséabondes en les revêtant d’une couche de vernis de la marque "acceptable".
Des militant.e.x.s ont perçu l’extrême dangerosité et violence de ce qui se passait au sein de l’université et iels se sont organisé.e.x.s pour exprimer leur désaccord profond (que nous partageons, bien évidemment). Iels l’ont donc exprimé en empêchant ces prises de paroles, en s’y opposant concrètement, directement et frontalement.
Sauf que cette action militante a été très fortement critiquée dans les médias et le rectorat a indiqué par voie de presse sa volonté de porter plainte contre X pour les motifs de « violations de domicile » et « contrainte ».
Évidemment, tout ça est absurde mais aussi bien les discours réactionnaires et fascistes que la menace de plainte (même si elle n’a finalement pas été posée) ont des effets très concrets et dévastateurs.
Nous l’avons vu, la presse réactionnaire (et quelques polémistes de bas étage en particulier) a mis un point d’honneur à créer pratiquement de toute pièce une polémique violente, lui permettant d’attaquer pèle-mêle les stratégies de lutte des militant.e.x.s, les droits fondamentaux des personnes trans, et toute forme de contestation au sein de l’université. Ce backlash n’est pas innocent. Même si l’université a toujours été une institution bourgeoise et rétive au changement, les menaces de représailles judiciaires et administratives qu’elle a formulées lors du printemps dernier représentent une nouvelle dimension dans la répression. Historiquement, les diverses actions parfois choc de la CUAE ou d’autres militant.e.x.s n’ont jamais subi une répression à une telle échelle. Par exemple, lorsque des miliant.e.x.s non identifié.e.x.s avaient entarté l’avocat fasciste Marc Bonnant en 2017, l’université n’avait eu aucune réaction répressive de la sorte.
Pour comprendre ce durcissement de la répression, il faut regarder le climat dans lequel il s’insère, un climat de montée et de radicalisation de l’extrême-droite partout en Europe (et ailleurs), qui s’exprime aussi par un renforcement des mouvements LGBTI-phobes, et en particulier de la transphobie.
En effet, cette affaire de conférences empêchées n’est qu’un révélateur d’une tendance à l’extrême-droitisation de toutes les sphères de la société (l’université au premier chef) bien plus profonde. Il est dès lors indispensable de le percevoir comme tel. Et c’est justement ce que le rectorat a fait semblant de ne pas comprendre depuis le 29 avril (date du premier blocage). Pour faire vivre une autre analyse de la situation que celle qu’on a pu lire dans les journaux bourgeois et/ou réactionnaires ; pour faire vivre une critique politique qui ne ressemble pas à la bouillie que le rectorat a servie tout au long de cette fausse-polémique ; pour faire vivre une critique de gauche face à de telles offensives de la droite dure ; pour qu’une affaire qui concentre tant de dérives ultra-réactionnaires ne se finisse pas dans l’anonymat le plus total, nous organisons une conférence où nous espérons vous voir nombreu.se.x.s.
Elle aura lieu le mardi 25 octobre à 18h30 en MR280 (UniMail). Pour cette conférence, nous aurons le plaisir de recevoir quatre intervenant.e.x.s avec quatre angles d’analyse différents afin d’enrichir la discussion. Tout d’abord, Frédéric Deshusses, historien et archiviste aux Archives contestataires, nous parlera de l’évolution de la répression dans les mouvements politiques étudiants en Suisse. Ensuite, un.e.x membre du CRAQ (Collectif Radical d’Action Queer) apportera une perspective militante à la question de la répression et du cissexisme. Alex Mahoudeau, qui a écrit le livre « La Panique woke », pourra également contextualiser cette panique woke dans un contexte plus large que Genève et son université. Enfin, Çağla Aykaç, qui enseigne au programme Horizon Académique et à l’Institut des Etudes Genre de l’université de Genève, ainsi qu’au master de recherche en art CCC-HEAD, discutera de menaces qui pèsent sur les Etudes Genre au niveau transnational, et d’enjeux et alliances de mouvements LGBTIQ+ au sein des universités.
Après ces interventions, il y aura un moment de discussion entre les intervenant.e.x.s et finalement le débat sera ouvert au public afin que nous puissions échanger plus largement. Un apéro est également prévu à la fin de la conférence pour continuer à discuter plus informellement.
Nous nous réjouissons de vous voir nombreuxses à cet événement !
La CUAE