Répression - Enfermement

Le procureur général Jornot, ancien militant néofasciste

Ce lundi 3 février, Olivier Jornot était tacitement réélu, faute de rival, au poste de procureur général du canton Genève.1 La ville est donc repartie pour six ans d’une politique ultra répressive et punitive à l’égard de ce que la presse bourgeoise se plait à appeler la « petite délinquance ». Comprenez : les pauvres, les Roms, les sans-papiers, etc. Comme le souligne les sociologues, le que punit-on cache bien souvent le qui punit-on.

Genève |

En 2007 déjà, Olivier Jornot avait été le principal artisan de la loi qui faisait de la mendicité un délit pénal. En 2012, il avait également été l’instigateur de la fameuse « Directive Jornot » qui fixait des peines d’emprisonnement ferme pour des personnes condamnées uniquement pour « séjour illégal ». En plus de détourner le regard des criminel·le·s en cols blancs et de laisser les mains libres aux policier·ère·s qui se plaisent à faire du profilage racial l’essentiel de leur métier, la politique menée par Olivier Jornot est largement responsable de la surpopulation endémique de la prison de Champ-Dollon. Celle-là même qui a conduit la prison au bord de l’implosion en 2014. Alors qu’il est établi que la surpopulation carcérale est directement liée au nombre de tentative de suicide en prison, cette année-là, le procureur général remplissait Champ-Dollon à plus de 230%... Aujourd’hui encore les conditions de détention inhumaines à Champ-Dollon sont largement décriées. Au nom de la Convention européenne des droits de l’Homme, le Tribunal Fédéral lui-même est allé jusqu’à épingler la prison à de multiples reprises pour avoir enfermé, 23 heures sur 24 et sur de longues périodes, un détenu dans moins de 4 mètres carrés.

Mais comment expliquer un tel zèle dans la mise en œuvre d’une véritable politique de criminalisation de la pauvreté et de la migration ? Il s’agit manifestement d’une question de formation politique puisqu’avant de laver sa chemise au PLR, c’est au sein du parti néofasciste Vigilance qu’Olivier Jornot a fait ses armes.

Ancêtre du MCG et de l’UDC genevoise, Vigilance est un parti d’extrême droite dissous en 1993. Le parti a réussi à entrer au Grand Conseil genevois en 1965 avec 10 sièges, puis 19 sièges en 1985. Il se fait remarquer en invitant Jean-Marie Lepen et en réclamant la fin des subventions pour SOS Racisme. Le parti n’existant qu’à travers ses membres, en voici un aperçu à travers quelques coups d’éclat de ses représentants les plus importants.

Vigilance est le parti de Roland Troyon, ex-membre de la Jeunesse hitlérienne. Celui-ci fonde, en 1975, un périodique militant pour l’instauration d’une dictature. Le journal comptait 1500 abonnés.

Vigilance est le parti de Francisco Torti, président du parti dès 1991. Celui-ci annonce : « J’en fais mon slogan : Vigilance ne sera pas un club pédés ! ».

Vigilance est le parti d’Eric Bertinat, aujourd’hui président du Conseil municipal de la Ville de Genève sous la bannière UDC et président de Vigilance en 1985. Il déclare alors : « L’homme et la femme égaux ? Tu parles ! Que chacun tienne sa place, que la mère éduque proprement ses enfants (aux pluriels) pour notre avenir, et que le père nourrisse dans l’honneur sa famille ».

Vigilance est le parti de Pierre Jacquiard, élu au Grand Conseil en 1985. Il se fait notamment remarquer par une intervention devant l’assemblé où il déclare : « Je suis fasciste et fier de l’être ! ».

Voilà donc le parti que le jeune Olivier, futur procureur en chef du canton de Genève, avait choisi pour se lancer en politique. En 2014 déjà, dans un tract distribué dans les rues de Genève on pouvait lire : « Le fascisme s’installe au cœur du pouvoir judiciaire du canton. (...) Pendant ce temps, les multinationales volent, les flics agressent et les spéculateurs dealent, toujours à l’abri des descentes de police. »


Notes
[1] Le procureur général du canton dirige l’autorité judiciaire et notamment le Ministère public. Il dicte en grande partie la ligne politique qui sera suivie par les procureurs du canton.
[2] Pour plus d’informations, voir notamment : Beguin Jerome, “L’extrême droite genevoise ; des origines à nos jours”, Editions Cabédita. Collection archive vivante, 2007.

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